Hackers séquestrés, secret d’Etat, appli « pirate »... Polar au Gabon

  • 22/09/2016
  • Source : nouvelobs.com
Alors que la Cour constitutionnelle doit se prononcer sur le résultat de la présidentielle au Gabon, deux Ivoiriens demeurent prisonniers du gouvernement d’Ali Bongo car les informations qu’ils détiennent sont trop sensibles.

Depuis près d’un mois, deux jeunes Ivoiriens – un petit génie de l’informatique et un entrepreneur (un peu trop) opportuniste – sont gardés au secret par le gouvernement gabonais. Leurs téléphones sont confisqués.

Le régime d’Ali Bongo n’a jamais communiqué sur leur sort. Ils ne sont pas officiellement mis en examen. Un avocat commis par certains de leurs proches a été fermement empêché de les voir. Ce sont les prisonniers les plus invisibles d’Afrique centrale.

Leur crime ? Avoir accepté de travailler, dans le cadre de l’élection présidentielle du 27 août dernier, pour le candidat… Ali Bongo, président sortant. Vous avez dit bizarre ? Pas tout à fait.

Storytelling victimaire

Si N’Cho Yao (le geek) et Gueu Zian (le businessman) sont séquestrés, ce n’est pas parce qu’ils sont des adversaires du pouvoir gabonais. C’est parce qu’ils détiennent une partie de la vérité sur le poker menteur électoral qui risque de faire exploser le pays, qu’ils se retrouvent confinés dans la zone de refoulement de l’aéroport de Libreville. Rembobinons.

Récemment, nous t’alertions, cher lecteur, sur ce polar politico-technologique. A la suite d’une énième élection contestée, le pouvoir d’Ali Bongo, fils et héritier d’Omar Bongo (défunte figure emblématique de la Françafrique), pointé du doigt pour avoir triché – notamment en faisant voter les morts dans son fief du Haut-Ogooué – ripostait en accusant son principal adversaire, Jean Ping, d’avoir embauché des hackers ivoiriens dans le but d’organiser des fraudes électorales. Une charge surréaliste dans un pays où le système électoral est 100 % manuel.


Ali Bongo, le 21 avril 2016 à New York - Loey Felipe/SIPA

Mais elle a eu quelque effet, sinon au Gabon, du moins ailleurs en Afrique francophone. Pour une raison simple : Ali Bongo, en dépit de son pedigree, s’est posé en victime de la Françafrique, faisant notamment filtrer sur Internet une conversation compromettante entre Ping et Mamadi Diané, conseiller du président ivoirien Alassane Ouattara, lequel est une figure très clivante en Afrique depuis son arrivée au pouvoir dans les soutes de l’armée française en 2011.

C’est ce storytelling victimaire que les deux séquestrés ivoiriens de l’aéroport de Libreville pourraient bien tailler en pièces, s’ils étaient libérés.

Contrôle des données


Nous sommes parvenus à recueillir leur témoignage, par une voie indirecte mais fiable. Et il complète le puzzle d’une incroyable histoire qui raconte une bataille féroce pour le contrôle des données sorties des urnes dans un contexte où, selon un « bon mot » attribué à tort ou à raison à Bongo père, « on n’organise pas une élection pour la perdre »...Lire la suite sur Nouvelobs.com