Moins d’engagement militaire et plus d’aide au développement : un rapport parlementaire sur la stabi-lité et le développement de l’Afrique francophone, adopté mercredi, prône un rééquilibrage de la politique africaine de la France, qui reste encore “à inventer”.
Voté par la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, ce rapport de 200 pages réalisé par les députés Jean-Claude Guibal (UMP, opposition de droite) et Philippe Baumel (PS, majorité socialiste) dresse un bilan contrasté de la politique française en Afrique et s’interroge sur la stratégie et les ambitions à long terme de la France dans son ancien pré-carré.
“D’une certaine manière, la politique africaine de notre pays reste à inventer”, conclut cette mission d’information en formulant toute une série de recommandations prônant le développement comme axe central d’une nouvelle stratégie de la France en Afrique. Pointant une “militarisation coûteuse”, le rapport souligne “l’engagement croissant de la France dans les crises qui secouent le continent”, rappelant qu’au cours des cinq dernières années Paris est intervenu en Côte d’Ivoire, au Mali et en Centrafrique, et a été à l’initiative de plusieurs opérations de maintien de la paix de l’ONU sur le continent.
“Cet engagement est tout à son honneur et a permis de sauver des pays qui étaient au bord du gouffre. Mais il a des limites : la France ne peut intervenir partout ni rester éternellement”, écrivent les députés, ajoutant que ces interventions “ne sont pas suf-fisantes pour rétablir des conditions de stabilité durable”. Critiquant une politique “qui réagit plus qu’elle n’anticipe”, le rapport insiste sur la nécessité de pla-cer l’aide au développement “au coeur de la politique africaine de la France”. Cette aide de 8,5 milliards d’euros “en diminution constante depuis 2011 a-t-elle répondu aux objectifs de développement et de stabi-lité de nos partenaires d’Afrique francophone ?”, s’interrogent les auteurs.
Les principaux pays bénéficiaires de l’aide sont “pour la plupart d’anciennes colonies avec les-quelles nous avons des liens privilégiés, politiques, culturels et commerciaux”. Or, “près de soixante ans après leur indépendance, ils n’ont cependant toujours pas réussi à sortir du sous-développement dans lequel ils sont englués”. “N’en déplaise au discours officiel, la politique d’aide au développement, telle qu’elle est conduite depuis des années, prête le flanc à la critique”, écrivent les députés, qui préconisent un recentrage sur les pays les plus pauvres et les plus fragiles et une aide prioritaire aux secteurs santé et éducation de base.
MM. Baumel et Guibal, qui ont effectué des auditions sur un an et se sont déplacés au Cameroun, évoquent aussi “le rapport compliqué et conflictuel” entre la France et ses partenaires africains. “Notre pays n’a pas su se distancier des classes dirigeantes qu’il a toujours soutenues, et surtout, ne s’est pas encore connecté avec les jeunes générations qui feront l’Afrique de demain”, écrivent-ils.
La politique africaine de la France reste à inventer