ONUCI / Guillaume NGEFA a définitivement quitté la Côte d’Ivoire : Son travail passé au scanner.

  • 03/02/2014
  • Source : L'Inter
Après avoir passé plus de dix (ans ) en Côte d’Ivoire dans la promotion et la protection des droits de l’Homme, M. Guillaume Andali Ngefa vient de prendre ses nouvelles fonctions au Mali : il a été nommé directeur de la Division des droits de l’homme à la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA) et Représentant du Haut-Commissaire aux droits de l’homme.

Belle promotion pour celui qui a servi la Côte d'Ivoire avec loyauté durant son passage à la tête de la division des droits de l'Homme de l'ONUCI, d'abord en tant que directeur adjoint, ensuite en tant que directeur intérimaire. Ami des uns et adversaires des autres, il s'est surtout distingué pendant la crise post-électorale, par la production de rapports documentés qui lui ont certes attiré les foudres des parties en conflit, mais dont la publication a permis de stopper le cycle de la violence.

Dans un contexte de guerre de décembre 2010 à juin 2011, il a toujours été aux côtés des femmes et des enfants pour leur apporter assistance. Tout comme il a été aux côtés des populations d'Abobo pour les soutenir pendant que la commune était le théâtre de violents affrontements. Guillaume Ngefa a également manifesté sa solidarité aux déplacés du camp de Nahibly et de la mission catholique à Duékoué, après les affrontements meurtriers où des centaines de civils ont été massacrés.

Pendant les mois de détention de l'ancien président au Nord, ainsi que de plusieurs de ses collaborateurs, il leur rendait constamment visite. Ce, en vue de faire des propositions pouvant améliorer leur condition de détention. Pour Mme Dominique Dieudonné, responsable du NDI Côte d'Ivoire, M Ngefa est un homme très courageux, ''qui a toujours pris le risque d'être aux côtés des populations''.

« Il a bravé les mesures de sécurité, en son temps, pour recueillir des informations pour les populations. J'ai une image positive de lui », a-t-elle indiqué. A en croire le président du Conseil d’administration de l'Action pour la Protection des Droits de l'Homme (APDH), le juge Fallet, Guillaume Ngefa a été plus qu'un conseiller. « Il a été pour nous un coach. On avait démarché la grande Chancellerie afin qu'il soit décoré pour service rendu à la Côte d'Ivoire. Malheureusement, il est parti trop tôt. On n'a pas toujours été d'accord, mais il a toujours respecté nos positions », a-t-il soutenu.

Un autre défenseur des droits de l'Homme, autrefois Coordonnateur de la Coalition de la société civile pour la paix et le développement démocratique (COSOPCI), Traoré Wodjo Fini apprécie à sa juste valeur les efforts de Mr Ngefa dans le cadre de la promotion et la protection des droits de l’Homme en Côte d’Ivoire. Mais M. Fini refuse de croire qu'il est un homme juste.

« Nous avons gardé une image mitigée de l'homme. Il aurait pu aider davantage les organisations de la société civile en termes de financement et de recommandations (...) », a indiqué M Wodjo, aujourd'hui vice-président de la Commission nationale des Droits de l'Homme de Côte d'Ivoire (CNDHCI). Au Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), on ne le connaît pas du tout. Du moins, c'est ce qu'a laissé entendre Maurice Kakou Guikahué que nous avons eu au téléphone. « On ne se pratiquait pas, malheureusement, je ne peux pas le juger », a-t-il coupé court.

Au Front populaire ivoirien (FPI), Sébastien Dano Djédjé, chargé de la réconciliation, dit le connaître, avant de préciser qu'ils n'échangeaient pas. « Je ne peux vous donner une appréciation sur son travail », a-t-il fait savoir.

Des victimes impressionnées par son travail
 
Aux yeux de certains proches de Ouattara, M Ngefa n'a pas été à la hauteur de sa mission. Une critique qui tire sa source d'un rapport documenté de la division des droits de l'Homme sur les tueries de Duékoué. L'ONUCI a ouvertement accusé les Forces pro-Ouattara d'être à la base d'un massacre de population. Un rapport qui a valu tous les noms d'oiseau à Guillaume Ngefa que d'aucuns ont accusé d'être un proche de Gbagbo.

« C'est un vendu », avait lâché un proche de Ouattara, aujourd'hui membre de l'équipe gouvernementale. Au RDR, le porte-parole principal, Joël N'Guessan, a une autre image de l'homme. A ses yeux, Guillaume Ngefa-Atondoko aime son travail et pose beaucoup d'actions dans la discrétion. « Il est d'une grande discrétion et d'une grande efficacité. Il rendait visite, dans la discrétion, aux pro-Gbagbo », nous a-t-il confié.

Quant aux victimes, elles disent lui devoir une fière chandelle. Leur président, Issiaka Diaby, n'a pas tari d'éloges à son endroit. « Il n'a dit que la vérité dans ses rapports. Il était toujours à nos côtés et nous a aidés dans la discrétion et l'efficacité. Si la Côte d'Ivoire n'a pas connu plus de 3000 morts, c'est un peu grâce à lui. Parce qu'en dénonçant les violations massives des droits de l'Homme, il a amené ceux qui les commettaient à les arrêter puisqu'ils savaient qu'ils étaient suivis.

Il a abattu un travail colossal. Nous, les victimes, ne pouvons que lui dire merci », a indiqué M Diaby, dirigeant de la plus grande structure de victimes de la crise post-électorale. Un avis partagé par le Père Cyprien de la mission catholique de Duékoué où s'étaient réfugiées des milliers de personnes pendant la crise post-électorale. « Je l'ai connu pendant la crise post-électorale.

C'est un monsieur qui travaille avec professionnalisme. Quand nous avions eu besoin de lui, il a toujours répondu présent. Et chaque fois que nous avons travaillé ensemble, nous étions toujours satisfaits. Il est discret, très efficace et profond dans son analyse. Il y a des personnes qui ont su tirer leur épingle du jeu pendant la crise post-électorale, et je pense qu'il en fait partie », a indiqué le père Cyprien.

C'est sans doute ces qualités qui ont valu au nouveau patron de la division des droits de l'Homme de la MINUSMA les hommages, le 27 août 2013, de la société civile ivoirienne. M Ngefa restera sans doute un ami de la Côte d'Ivoire qu’il aura servi avec autant d’abnégation que de loyauté dans une période difficile.
 
Y.DOUMBIA