Le propriétaire du Super U de Podensac, en Gironde, lorgnait une Porsche. Il a finalement écopé de six mois de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende
C'était une froide nuit de décembre 2013. Une équipée en bord de Garonne qui vaudrait à Élie Gayffier, le propriétaire du Super U de Podensac, et à son fils Julien une place de choix dans le tableau d'honneur des pieds nickelés de l'année. Mais le tribunal correctionnel de Bordeaux a été plus prosaïque. La balade nocturne vaudra six mois de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende pour Élie et trois mois de prison avec sursis pour Julien. Motif : tentative d'escroquerie à l'assurance et complicité.
L'affaire s'est déroulée ainsi. Ce soir-là, au pied du pont de Béguey, à Podensac, il y avait Élie, Julien, 31 ans, et une luxueuse Mercedes classe S, qu'Élie était en train de payer en leasing (location-vente) par l'intermédiaire de sa société. À la demande de son père, Julien a fait le guet. Élie a enlevé les plaques minéralogiques, ouvert les vitres, calé la pédale d'accélérateur avec un morceau de bois et a envoyé la berline au fond de la Garonne.
La voiture est réapparue à marée basse...
Le lendemain, Élie a porté plainte à la gendarmerie de Langon. Il a expliqué qu'il s'était rendu à Toulouse avec Julien, qu'il avait laissé sa voiture sur le parking de Lidl et qu'à son retour il avait constaté que le véhicule avait été volé. Julien a confirmé. Ils ont raconté que la voiture contenait cinq caisses de vin, de quoi exciter la convoitise des voleurs. Mais les gendarmes, pas plus que l'assureur, n'en ont cru un mot. Il faut dire que deux heures avant, la Mercedes, qui n'avait pas avancé de plus de quelques mètres dans le fleuve, était réapparue, sous l'effet de la marée basse. « C'est moche, soupire la procureur Catherine Figerou. Il ne regarde pas beaucoup les séries télévisées. S'il l'avait fait, il aurait su qu'à partir du moment où l'on possède un téléphone portable on passe à côté d'un certain nombre de relais. Il est donc facile de tracer les déplacements de quelqu'un. Et ni lui ni son fils n'ont été à Toulouse… »
Par contre, Élie, quelques jours plus tôt, s'était rendu à Pessac, dans une concession Porsche. Placé en garde à vue, il révélera le pot aux roses aux gendarmes : il s'était débarrassé de sa Mercedes car elle ne lui plaisait plus, et il ne voulait plus payer le leasing afin de se rabattre sur une somptueuse Porsche Panamera…
"Ça coûte cher d'aller chercher une voiture dans la Garonne"
C'est inadmissible de mettre son fils dans une telle situation, simplement pour changer de voiture. C'est lamentable ! » ne décolère pas la présidente Caroline Baret. « C'est minable ! Ça coûte cher d'aller chercher une voiture dans la Garonne », renchérit la procureur, qui veut un an avec sursis et 20 000 euros d'amende.
« C'est un passage à l'acte non réfléchi. Avec un mode opératoire aussi bête, il ne pouvait espérer échapper à quoi que ce soit », plaide son avocat, Me Trassard.
L'affaire aura été d'autant plus contre-productive que la justice finira par saisir 40 000 euros sur les comptes d'Élie Gayffier, soit le prix de la Mercedes. « Vous avez été puni par là où vous avez péché, lance la présidente. Votre leasing était déduit des frais du magasin et, au final, vous avez remboursé la voiture sur votre fortune personnelle ! »
Emporté par sa passion pour les Porsche, Élie n'avait pas remarqué qu'il ne lui restait que quelques mois avant d'arriver au terme de son contrat. La Panamera, semble-t-il, ne pouvait pas attendre jusque-là.
Il noie sa Mercedes pour s'offrir une Porsche avec l'assurance - Photo à titre d'illustration