À la Une: le coup d’envoi de la campagne électorale en Côte d’Ivoire

  • 15/10/2020
  • Source : RFI
Campagne pour l’élection présidentielle du 31 octobre, avec tout d’abord ce message aux candidats, délivré par le président de la Commission électorale indépendante, Ibrahime Kulblert Coulibaly, et reproduit par le quotidien L’Intelligent : « En devenant can­didats à l’élection du Pré­sident de la République du 31 octobre 2020, nul doute, vous avez décidé d’apporter, aux soupirs du peuple, le remède qui gué­rit. Usez de tous les moyens, sauf ceux qui contrarient la réglementation en vi­gueur, pour séduire les électeurs. »

« La campagne est ouverte ! », s’exclame pour sa part Fraternité Matin en première page. « Depuis ce matin, les différents candidats peuvent présenter leurs projets aux populations. Quatre candidats ont été retenus par le Conseil constitutionnel, rappelle le journal. Il s’agit du président sortant, Alassane Ouattara, candidat du RHDP, d’Henri Konan Bédié, porte-étendard du PDCI-RDA, de Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, et de Kouadio Konan Bertin candidat indépendant. »

Inquiétudes…

Alors, s’interroge Le Point Afrique, « que nous réserve la Côte d’Ivoire d’ici le 31 octobre ? La question mérite d’être posée alors que l’opposition est vent debout depuis l’annonce, le 6 août, de la candidature d’Alassane Ouattara à un troisième mandat. Il faut dire que le 5 mars, rappelle Le Point Afrique, le président, âgé de 78 ans, avait annoncé qu’il ne se représenterait pas, afin de "transférer le pouvoir à une nouvelle génération". Une décision applaudie partout en Afrique, notamment par la jeunesse. Du côté du partenaire privilégié de la Côte d’Ivoire, la France, Emmanuel Macron avait même "salué cette décision historique d’un homme de parole et d’un homme d’État". Huit mois plus tard, le ton a changé, constate encore Le Point Afrique. Les opposants au président ivoirien en appellent désormais à l’ONU. Et les chancelleries s’inquiètent. »

Tensions…

Et attention, prévient Le Monde Afrique, « dans un pays qui a connu près de quinze ans de crise, un rien peut faire resurgir les craintes et la méfiance, surtout dans les lieux meurtris par le passé. »

Exemple à Yopougon, où des militants pro et anti-Gbagbo s’étaient affrontés en 2010-2011, la tension est toujours palpable. Récemment, pointe Le Monde Afrique, « le président du Collectif des victimes en Côte d’Ivoire a réuni les gens de Yao Séhi et Doukouré, deux quartiers voisins de Yopougon, qui s’étaient battus à l’époque. Il faut apaiser les esprits en train de s’échauffer de nouveau à l’approche de l’élection présidentielle du 31 octobre. Déminer les tensions, montées d’un cran depuis les violences du mois d’août qui ont fait une quinzaine de morts dans le pays après l’annonce de la candidature d’Alassane Ouattara à un troisième mandat controversé. »

L’ivoirité se réinvite dans le débat

Attention aussi aux « fantômes de l’ivoirité », prévient Jeune Afrique.

« Près de vingt ans après avoir été l’un des ferments de la crise politico-militaire, la question de l’ivoirité se réinvite en effet dans la campagne pour l’élection présidentielle du 31 octobre, constate l’hebdomadaire panafricain. Au risque de réveiller les vieux démons identitaires. (…) Ce concept prétendument culturel, qui érige la préférence nationale en dogme, avait été relancé par Bédié dans les années 1990 après la mort de Houphouët-Boigny, rappelle Jeune Afrique. Censé distinguer les "vrais" Ivoiriens des "faux", il avait surtout pour objectif d’éliminer Alassane Ouattara de la course à la magistrature suprême et avait débouché sur une vaste politique d’exclusion des citoyens en fonction de leurs origines. »

Alors, « vingt ans ont passé, mais les vieux fantômes de l’ivoirité hantent toujours la lagune Ebrié, relève Jeune AfriquePeut-être moins visibles, mais tout aussi dangereux à l’approche de l’élection présidentielle. Dans une campagne tendue, alors que beaucoup craignent de voir le pays replonger dans la crise, l’ivoirité est redevenue un argument politique. Chaque camp accusant l’autre d’en faire son fonds de commerce de manière insidieuse, au risque de réveiller les vieux démons identitaires. »

Union sacrée ?

Pour Le Pays au Burkina, « les discours haineux, empreints de xénophobie et autres propos va-t-en-guerre, ne doivent plus avoir droit de cité dans ce pays qui n’a pas encore fini de panser ses plaies. Cela dit, la campagne désormais lancée, on peut s’interroger sur le nombre d’Ivoiriens qui se donneront la peine d’aller retirer leurs cartes d’électeurs, le tout, c’est connu, n’étant pas de se faire enrôler. En tous cas, conclut le journal, tout le mal qu’on puisse souhaiter à la Côte d’Ivoire, c’est l’union sacrée de ses filles et fils pour négocier, en douceur et en toute tranquillité, le virage dangereux qu’elle s’apprête à amorcer. »