La procureure de la CPI est dans de beaux draps. Elle doit être certainement gagnée par l’anxiété à l’approche de la date butoir de ce lundi 13 janvier 2014 qui lui a été signifié.
Mais quelles preuves supplémentaires peutelle encore brandir contre le président Laurent Gbagbo ? Il y a des raisons de croire que la procureure n’ait rien de plausible à présenter aux juges, elle qui avait d’ailleurs refusé d’enquêter à nouveau.
Retour sur le dossier Gbagbo qui, au delà du bureau du procureur qui a été totalement ébranlé et discrédité, décrédibilise une CPI aujourd’hui plus que jamais sous le feu des projecteurs (les chefs d’Etat africains avaient menacé de retirer leurs pays en masse de l’institution) qui semble obéir à un agenda juridico-politique en refusant de libérer le président Gbagbo en l’absence de preuves.
De Ocampo à Bensouda : aucune preuve contre Gbagbo
Depuis son transfèrement à La Haye le 30 novembre 2011, le bureau du procureur a toujours peiné à justifier les faits de crimes reprochés à Gbagbo. L’ancien procurer Louis Moreno Ocampo qui était en total collusion avec le régime d’Abidjan (il avait discrètement rencontré Ouattara à Paris quelques jours seulement avant le transfèrement de Gbagbo) s’était rendu à Abidjan le 1er juin 2012 pour collecter des preuves avec le soutien du pouvoir.
Avant de passer totalement la main en juin 2012 à Fatou Bensouda. Mais celle-ci s’était déjà rendue à Abidjan dans le cadre du dossier Gbagbo en avril 2012.
Résultats des courses : un document bancal contenant les charges contre Gbagbo produit lors de l’audience de confirmation ou d’infirmation des charges qui a eu lieu le 19 février jusqu’au 28 février 2013. Un document qui avait été qualifié de brouillon par Me Fauveau Ivanovic qui épaule Me Emmanuel Altit dans cette affaire.
«On se demande si c’est un brouillon ou un mémorandum interne au Bureau du procureur pour savoir quel mode de responsabilité choisir à l’encontre du président Laurent Gbagbo. Pourtant, le Président Gbagbo a le droit de savoir de quoi, pourquoi et en vertu de quoi on l’accuse mais on ne sait rien avec le Dcc. Aucune preuve concrète de ces allégations vagues, imprécises, politiques et brumeuses, n’est visible dans le Dcc. Car ne s’appuyant pas sur la réalité», avait-elle chargé le 25 février 2013, déclenchant la colère du procureur.
Dans cette même logique, le 3 juin 2013, la Chambre préliminaire I a ajourné l’audience de confirmation des charges et demandé au procureur d’envisager d’apporter des éléments de preuves supplémentaires ou de procéder à de nouvelles enquêtes relativement aux charges portées contre Laurent Gbagbo. Le 19 juillet 2013, Fatou Bensouda s’était encore rendue à Abidjan pour la deuxième fois.
Mais elle est repartie bredouille.«Je suis venue en Côte d’Ivoire pour consolider le travail de mon équipe. Parce que c’est cette équipe qui est chargée de récolter les informations. Et j’ai eu des assurances que toutes les requêtes auront des réponses», déclarait-elle à Abidjan avant son départ. Preuves ou assurance d’en avoir ? La confession est révélatrice.
La pression a changé de camp
Bensouda semble n’avoir pas eu gain de cause à Abidjan. Ou du moins elle s’en sort avec des broutilles. Et c’est tout naturellement que le lundi 12 août 2013, la procureure de la CPI fait appel de la décision du 3 juin dernier de la Chambre préliminaire demandant d’apporter des preuves additionnelles ou de mener de nouvelles investigations. Malheureusement pour elle, le 16 décembre 2013, la Chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) a rejeté son appel portant ajournement de l'audience de confirmation des charges.
Suite à cette décision, la Chambre préliminaire I a établi un nouveau calendrier pour la divulgation de preuves supplémentaires ainsi que pour les soumissions écrites du Procureur, de la Défense et des victimes participant à cette affaire. La pression a donc changé de camp.
En effet, selon le dernier calendrier établi par la chambre préliminaire I en date du 17 décembre 2013, Bensouda a jusqu’au 13 janvier 2014 pour déposer son document contenant les preuves supplémentaires contenant les charges. Elle a donc jusqu’à lundi pour le faire, ou du moins pour parachever sa forfaiture si d’aventure elle a déjà déposé une partie de ses preuves fabriquées.
Ce qui reste à Fatou Bensouda : inventer des preuves
En l’absence de preuves, Fatou Bensouda va-t-elle tomber dans la bassesse en inventant des preuves contre Gbagbo ? En tout c’est certainement la parade qui lui reste. Puisque le bureau du procureur est habitué aux scandales du genre. On se souvient que la défense avait accusé la procureure Fatou Bensouda de subornation de témoins lors de la dernière audience de l’affaire Bemba, le 6 décembre dernier.
Me Flamme, l’avocat belge de Jean-Jacques Mangenda co-prévenu avec Jean-Pierre Bemba, Fidèle Babala et Me Aimé Kilolo a affirmé détenir copie d’une lettre d’un témoin à charge dans laquelle celui-ci réclame une rétribution à Bensouda après sa déposition. Une lettre sur laquelle vingt-un autres témoins à charge ont apposé leurs signatures.
Ces graves révélations ont mis la cour dans l’embarras et l’audience avait été suspendue. C’est le dernier virage pour la procureure controversée de la CPI. Et les intellectuels ivoiriens qui ont publié l’ouvrage «Cour pénale internationale- L’introuvable preuve contre le président Laurent Gbagbo» apportent une tonne d’éléments au moulin de la Défense pour casser la mascarade de Bensouda et ses mandants.
Nous y reviendrons.
Benjamin Silué
Affaire Gbagbo. Bensouda au bout du rouleau ! - Photo à titre d'illustration