C'est officiel. Depuis le mardi 1er octobre, un communiqué lu au journal télévisé de 20 heures et co-signé par le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et de la sécurité et le ministre auprès du président de la République chargé de la Défense, invite les militaires et paramilitaires en exil à revenir en Côte d'Ivoire, au plus tard le 30 novembre 2013.
Selon ce communiqué, les militaires qui ne rentreront pas au pays avant cette date, seront considérés comme déserteurs de l'armée ivoirienne et radiés des effectifs des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI), de la gendarmerie nationale, de la police nationale et des forces paramilitaires. Cet ultimatum, qui traduit la volonté du chef de l'Etat de faire revenir sur les bords de la lagune Ebrié, tous les militaires en rupture de banc, arrive au moment où des dispositions sont prises au sein de la grande muette en vue d'y voir un peu plus clair dans la position de chaque élément. Notamment, celle de ceux considérés comme les grands malades.
Selon un document en notre possession, l'état-major général des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI) a établi une liste de 260 militaires considérés comme des grands malades, mais dont la hiérarchie est sans nouvelle depuis quelque temps. La note adressée aux chefs de corps et commandants des différentes unités indique que suite à une tournée effectuée par la «Commission de réforme de la Direction de la Santé et de l'action sociale des Armées (DSASA), au sein des forces et unités, deux cent soixante (260) militaires déclarés grands malades, dont la liste est jointe en annexe, ne se sont pas présentés devant ladite commission et sont donc considérés comme absents à l'unité».
La note signée par le général de brigade, Touré Sékou, chef d'état-major général adjoint chargé des opérations, demande aux responsables des unités de «bien vouloir, en coordination avec les médecins-chefs des forces et unités placés sous vos ordres, prendre contact physique avec ces grands malades absents et de rendre compte de leur position à l'EMG/DORH (Etat-major général, direction des opérations et des ressources humaines) avant le 25 septembre 2013 délai de rigueur, sous peine de suspension de leur solde». Depuis la fin de la crise post-électorale, faut-il le souligner, le président Alassane Ouattara aurait demandé à la hiérarchie militaire de suspendre l'application du code de la fonction militaire relatif à la désertion.
Au nom de la réconciliation nationale, selon certaines sources. Ainsi, le chef de l'Etat lui-même, et des ministres, dont ceux chargés de la Sécurité et la Défense, ont lancé plusieurs appels et mené de nombreuses actions en direction des militaires en rupture de banc, en vue de leur retour au pays. L'on se souvient encore du retour du Commandant du théâtre des opérations du temps de l'ex-président Laurent Gbagbo, Boniface Konan, suivi de plusieurs officiers supérieurs, officiers et militaires du rang.
Mais, la plupart des exilés militaires et paramilitaires sont restés loin des casernes. Pis, certains sont cités dans les attaques contre le nouveau régime. Deux ans après la crise post-électorale, le chef suprême des armées a donc décidé de siffler la fin de la récréation. Le 18 septembre dernier, au cours d'une réunion du Conseil national de la sécurité, il aurait décidé de lancer un ultimatum à tous les déserteurs. Ultimatum rendu public par le communiqué du mardi dernier. «Les grands malades», dont le cas préoccupe l'état-major, seraient-ils, tous ou presque, des exilés qui auraient été déclarés sous ce vocable pour tromper la vigilance de la hiérarchie? D'autant plus que la commission de réforme de la DSASA ne les a rencontrés nullle part.
Certains éléments, qui ne sont pas en odeur de sainteté avec leurs supérieurs, seraient-il classés dans cette catégorie pour les punir? Joint dans la soirée d'hier, un officier supérieur des FRCI nous a confié que cette question des grands malades relève de la compétence de la direction de la santé, seule habilitée à donner de plus amples informations sur le sujet. Un autre, joint plus tard, nous dira que la démarche de la Commission de réforme de la Direction de la Santé et de l'action sociale des Armées (DSASA) fait par de la revue de troupes normale dans l'armée. «C'est un exercice de routine qui permet de se faire une idée exacte de la position de chaque élément. Tout manquement à cette mesure expose à des sanctions disciplinaires», a-t-il ajouté. Mais, tous les deux, s'exprimant sous le sceau de l'anonymat, s'accordent à dire que cette revue des troupes n'a rien à voir avec l'ultimatum lancé aux militaires exilés.
H.O
Armée nationale : 260 militaires dans le viseur du pouvoir - Photo à titre d'illustration