Après une longue période de brouille, l’ex-Premier ministre ivoirien, Charles Konan Banny, est rentré dans le rang de l’ancien parti unique. Et a désormais un seul objectif lui permettre de reconquérir le pouvoir.
Très discret depuis la présidentielle d’octobre 2015, Charles Konan Banny, 74 ans, avait fini par se faire oublier. Le 9 avril, l’ex-Premier ministre (2005-2007) a été décoré par le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l’ancien parti unique, dont il est l’un des poids lourds. Un retour en grâce inimaginable six mois plus tôt. Car en 2015, passant outre la consigne édictée par le leader de son propre camp, Henri Konan Bédié, il avait présenté sa candidature à l’élection présidentielle, face à Alassane Dramane Ouattara (ADO). S’il s’était finalement retiré in extremis, l’initiative avait provoqué une cassure au sein du PDCI qui aura duré de longs mois.
Une semaine plus tard, en ce lundi de Pâques où Abidjan semble vidé de ses habitants, c’est un Charles Konan Banny revigoré qui nous a reçus dans son imposante demeure, couleur vert pomme, du quartier de Riviera-Golf pour un entretien sans faux-semblant. « Il y a peut-être un rapport avec la résurrection du Christ », glisse, taquin, l’un de ses proches. Pendant près de deux heures, assis à l’ombre d’un jambosier rouge, Konan Banny a évoqué les relations tumultueuses entre le PDCI et le Rassemblement des républicains (RDR), l’échéance électorale de 2020, mais aussi les affaires judiciaires et la réconciliation.
Son retour dans le giron du parti, après avoir, en 2015, qualifié l’appel de Daoukro « de coup de force inacceptable », n’est pas anodin. Plus de deux ans après l’accord entre les deux formations qui avait conduit le PDCI à ne pas présenter de candidat face à ADO – en échange d’une alternance en 2020, mais au prix d’une fronde interne –, plusieurs cadres et militants martèlent leur volonté de concourir à la prochaine présidentielle.
Konan Banny, issu d’une grande famille baoulée, est de ceux-là. Aujourd’hui réconcilié avec l’inamovible Bédié, l’ancien président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR) affirme vouloir aider le PDCI à reconquérir le pouvoir. En 2020, cela fera plus de vingt ans que le parti fondé par Félix Houphouët-Boigny n’y aura pas goûté. « Certains voudraient-ils que l’on attende encore vingt ans ? » interroge-t-il, provocateur. Poser la question, c’est déjà y répondre…
Jeune Afrique: Le PDCI vous a décoré le 9 avril. Êtes-vous satisfait de ce retour en grâce ?
Charles Konan Banny : J’ai reçu cette décoration comme un honneur. Mais ce n’est pas une prime au retour, car je n’étais parti nulle part.
La question de l’alternance entre le RDR et le PDCI à l’horizon 2020 fait l’objet de débats intenses. Considérez-vous qu’une candidature du PDCI à la prochaine présidentielle est non négociable ?
Négocier quoi ? Et avec qui ?
Avec votre allié, le RDR…
Pourquoi voudriez-vous qu’un parti négocie avec un autre son intention de présenter ou non un candidat ? Le PDCI demeure la première formation politique de Côte d’Ivoire, c’est en tout cas ma conviction – nonobstant ce que l’on peut en dire dans les salons abidjanais. Ce que je souhaite, c’est qu’il renoue avec ses valeurs fondatrices, et qu’à partir de là il puisse recruter de nouveaux militants, car nos sympathisants sont nombreux. Donc on ne négocie pas !
Charles Konan Banny : « Le PDCI doit avoir son candidat en 2020 » - Photo à titre d'illustration