Composition de la commission électorale indépendante les velléités suspectes d’ADO

  • 17/06/2014
  • Source : le pays
La polémique enfle autour de la composition de la Commission électorale indépendante (CEI), en vue de la présidentielle de 2015 en Côte d’Ivoire. La pomme de discorde est essentiellement liée à la présence, au vu de la nouvelle loi, d’un représentant du président de la République et un autre représentant du président de l’Assemblée nationale au sein de la Commission dont les membres sont passés de 13 à 17.

La présence de son représentant au sein de la CEI, est jugée pénalisante pour les autres candidats

Malgré la représentativité des partis politiques de l’opposition et de la majorité, de la société civile et de l’administration à part égales de quatre représentants chacun, le problème fait des gorges chaudes sur les bords de la lagune Ebrié, parce que le président Allasane Dramane Ouattara (ADO), dont le 17ème membre sera le représentant, est déjà candidat déclaré à sa propre succession. Aussi, la présence de son représentant au sein de la CEI, est-elle jugée pénalisante pour les autres candidats. Ces récriminations sont, du reste, fort compréhensibles, surtout si ce représentant du chef de l’Etat ne devrait pas être dans cette instance à titre d’observateur, mais avec une voix délibérative, en tant qu’électeur le cas échéant. Dans de telles conditions, les velléités du pouvoir de faire passer une telle mesure paraissent suspectes. D’autant plus que cette nouvelle disposition ne fait pas l’unanimité au sein même de la majorité.

Ainsi, après les critiques acerbes venant de l’opposition et de la société civile, le PDCI, allié du parti d’ADO au sein du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), a immédiatement saisi le Conseil constitutionnel, deux jours après l’adoption de la loi par le Parlement ivoirien, le 28 mai dernier, aux fins de demander à cette institution de se prononcer sur la conformité de cette loi avant que le chef de l’Etat ne la promulgue.
Comme on le voit, en Côte d’Ivoire, tout le monde connaît l’importance de la CEI, et tout le monde y est accroché. Mais cette situation a l’inconvénient de fausser le jeu dès le départ en cela qu’elle laisse entrevoir des membres partisans. Pourtant, les Ivoiriens devraient faire beaucoup attention et se méfier de cette structure qui pourrait être à l’origine de bien des malheurs. Tirant leçon des tiraillements du passé, ils devraient s’efforcer de mettre en place une commission consensuelle. Autrement, celle-ci risque d’être encore source de malheurs, de pleurs et d’affliction pour le peuple ivoirien.

Le président Ouattara gagnerait à user de tact pour ne pas voir tout le monde se liguer contre lui

En fait, ADO n’a pas besoin d’une CEI non consensuelle, taillée sur mesure, pour s’assurer une victoire à la présidentielle de 2015. Au contraire, une telle CEI pourrait entacher l’éclat de sa victoire éventuelle. Son bilan devrait largement plaider pour sa reconduction à la tête de l’Etat ivoirien. De ce point de vue, c’est un faux combat qu’il mène, qui pourrait, du reste, s’avérer dangereux pour le pays, alors qu’il est censé apporter un plus à la démocratie ivoirienne. Aussi, la Côte d’Ivoire ne saurait-elle s’accommoder d’une CEI à palabres. ADO ne doit pas donner une raison à ses contempteurs de contester sa victoire probable en 2015. Et s’il a fait le choix de la démocratie et de la transparence, qu’il assume ses responsabilités jusqu’au bout. La peur de l’expérience de 2010, ne doit pas l’amener à poser des actes aux antipodes de la démocratie. « Chat échaudé, craint l’eau froide, » dit l’adage. Mais dès lors que c’est lui-même qui est aux commandes, pourquoi aurait-il besoin d’une CEI « acquise » ?

Serait-ce parce qu’il n’est pas sûr du soutien indéfectible de son allié de poids, le PDCI ? Quoi qu’il en soit, en manœuvrant de la sorte, ADO donne le sentiment qu’il n’est pas sûr que son bilan suffira à le faire réélire, dans une Afrique politique où la vérité d’aujourd’hui n’est pas celle de demain, et où les alliances se font et se défont du jour au lendemain. Aussi, autant le Front populaire ivoirien, dans sa configuration actuelle, ne semble pas en mesure de l’inquiéter en 2015, autant, si le parti du pachyderme descend dans l’arène contre lui en 2015, il pourrait avoir du souci à se faire.

Etant donné que ce dernier est entré dans la danse pour contester cette nouvelle loi de la CEI, le président Ouattara gagnerait à user de tact pour ne pas voir tout le monde se liguer contre lui, dans une stratégie du tout sauf ADO. Or, plus il lutte pour sa réforme, plus il paraît suspect. Et la mise en place de cette instance risque d’apporter plus de menaces que de solutions pour l’élection de 2015, tant elle paraît dangereuse pour la nation et pour la paix sociale. La sagesse voudrait donc qu’aucun candidat n’ait de représentant à la CEI, ou alors que tous en aient au même titre. Le plus simple serait qu’ADO reconsidère sa position et joue la transparence jusqu’au bout. Cela serait à son honneur, et il aurait tout à y gagner.



Outélé KEITA