Jean-Luc Agboyibo est un passionné de basket. Pour lui, le sport est un puissant outil d’éducation et de développement. Pour partager son amour du ballon avec les jeunes des prisons ivoiriennes, il a crée le programme MiLédou.
Proposé à la maison d’arrêt d’Abidjan et centré sur le basket, MiLéDou est le programme phare de Leading Youth, Sport and Development (LYSD). Dirigée par Jean-Luc Agboyibo, tout juste 30 ans, cette organisation utilise le sport comme outil d’éducation et de rassemblement.
Elle comprend aujourd’hui vingt-cinq éducateurs qui encadrent des jeunes dans les capitales, mais aussi dans les villages du Togo et de la Côte d’Ivoire, et peut-être bientôt ceux du Burkina Faso et de la Guinée.
« On emmène des jeunes de Lomé en bus jouer dans le Nord, et vice versa. Ils créent des liens, grandissent ensemble. Ils constitueront un réseau au sein duquel on ne parlera plus autant d’ethnies, de couleur…, affirme Jean-Luc Agboyibo. Le but, c’est d’en faire de bonnes personnes, le basket n’est en réalité qu’un prétexte. »
Un sport mixte
C’est en 2013 que le jeune homme, de retour dans son pays natal, le Togo, après des études à l’université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l’Amos Sport Business School, spécialisée dans le management du sport, lance son initiative. Il travaille alors en parallèle pour un site d’informations sportives, puis rejoint Canal+ Afrique, où il développe et commercialise les contenus sportifs. Mais, très vite, le besoin de voler de ses propres ailes se fait sentir. Passionné de basket, il se consacre à son projet à temps plein, utilise son réseau, tissé depuis plusieurs années dans les milieux sportifs, pour lever les premiers fonds. Résultat : près de 30 000 euros sont collectés dès la première année.
On ne peut laisser les jeunes sur le bas-côté et espérer qu’ils seront assez outillés pour développer nos pays.
« Le sport a un réel pouvoir. Et le basket, particulièrement, avance Jean-Luc Agboyibo. Il permet notamment de rassembler aussi bien les filles et les garçons sur un même terrain, contrairement au foot. Notre objectif est d’avoir 40% de filles lors des tournois. Et on y arrive petit à petit. À Yopougon, très récemment, on a atteint ce taux de joueuses, et ce sont elles qui ont mis l’ambiance. Si on avait opté pour le foot, on aurait eu à coup sûr 90% de garçons. » L’organisation a désormais atteint 100 000 euros de budget, et les sponsors sont de plus en plus nombreux et variés, allant des fondations aux banques, en passant par des PME souhaitant améliorer le quotidien des enfants de leurs employés.
Dimension sociale
Les chantiers démarrés par MiLéDou sont nombreux : réfection de terrains de basket, organisation de tournois, participation aux camps NBA en Afrique, octroi de trente-cinq bourses annuelles aux meilleurs élèves, accompagnement des meilleurs talents à l’étranger – deux sont actuellement aux États-Unis, un autre en Afrique du Sud. LYSD prépare également sa diversification en proposant du conseil. Quelque peu désabusé par la politique, le pourtant « fils de » Yawovi Agboyibo, l’ancien Premier ministre togolais, croit surtout en l’entrepreneuriat social.
« On peut faire du business tout en faisant du bien. Nous, les jeunes Africains qui avons cette envie de participer au développement du continent, devons inclure cette dimension sociale dans nos activités. Le développement, on l’obtiendra tous ensemble ou on ne l’obtiendra pas. Il est plus facile de se dire que l’on va rentrer au pays et se faire le maximum d’argent, tout en en redistribuant ici et là.
C’est ce qui s’appelle faire de l’humanitaire… et ce modèle ne marche pas. On ne peut laisser les jeunes sur le bas-côté et espérer que, dans vingt ou vingt-cinq ans, ils seront assez outillés pour développer nos pays ou a minima pour comprendre les politiques menées par leurs dirigeants. »
Par Haby Niakate
Photo à titre d'illustration | La MACA : Maison d'Arrêt et de Correction d'Abidjan