La Côte d’Ivoire, qui célèbre ce 7 août le cinquante-septième anniversaire de son indépendance, est toujours à la recherche de sa gloire passée. Après la mort du « Vieux », Félix Houphouët-Boigny, le premier président, le pays s’est enfoncé dans une crise dont l’issue n’est toujours pas certaine, en témoigne la réminiscence constante d’actes de rebellions depuis la chute de Laurent Gbagbo. Retour, en images d’archives, sur l’histoire de la République indépendante de Côte d’Ivoire.
L’ancienne colonie française a accédé à son indépendance le 7 août 1960 sous la houlette de son premier Président Félix Houphouët-Boigny (1905-1993).
La Côte d’Ivoire aurait-elle besoin d’un nouveau docteur ? S’il est vrai que Félix Houphouët-Boigny, ancien « médecin indigène » et premier président du pays en 1960, est loin d’avoir été un démocrate – l’homme, qui n’aimait guère la contradiction, a gouverné la jeune République d’une main de fer –, force est de reconnaître que durant sa mandature l’ancienne colonie française a bénéficié d’une stabilité politique et d’un essor économique qui l’ont hissée au rang d’exemple sur le continent.
Entre les années 1960 et 1980, l’économie, encadrée par l’Etat, essentiellement axée sur la production de café et de cacao, connaît un formidable essor qui bénéficie aux secteurs industriel et financier. Le niveau de vie de la population et la croissance démographique augmentent. Abidjan se pare d’infrastructures modernes et devient le phare de l’Afrique de l’Ouest. Mais, dans le courant des années 80, dans un contexte mondial plus difficile, marqué par la chute du cours des matières premières agricoles, l’économie connaît des signes d’essoufflement que le pouvoir ne parvient pas à résorber.
A la mort du « Vieux », le 7 décembre 1993, le pays est agité par une forte tension sociale, animée par le mouvement étudiant et des opposants politiques parmi lesquels Laurent Gbagbo, qui s’était présenté à l’élection présidentielle de 1990. Le chômage est l’un des défis que doit relever le successeur de Félix Houphouët-Boigny, Henri Konan Bédié, élu à une écrasante majorité en octobre 1995.
Héritier désigné du parti au pouvoir pendant 25 ans, Henri Konan Bédié s’attaque à l’inflation et à la réduction de la dette de l’Etat en employant des mesures drastiques. Une politique qui le rend impopulaire. Cette impopularité est renforcée par la révélation de scandales politico-financiers. Rompant avec son prédécesseur, Henri Konan Bédié exacerbe les clivages ethniques en développant le concept d’« Ivoirité », qui divise les habitants en vrais et faux Ivoiriens en fonction de leurs origines et de l’ancienneté de leur établissement sur le territoire national. S’appuyant sur ce dernier, il conteste la nationalité de l’un de ses principaux adversaires à la prochaine élection présidentielle, Alassane Dramane Ouattara. Interpellée, la Cour suprême n’arrive pas à trancher, mais le ver est dans le fruit. Les tensions politiques, sociales et économiques s’accroissent, et c’est dans un climat délétère qu’a lieu le coup d’Etat militaire de décembre 1999.
A la tête des soldats qui renversent le président, le général Robert Guéï, devient de fait le nouveau chef de l’Etat de Côte d’Ivoire. Henri Konan Bédié s’exile en France, le nouveau pouvoir fait procéder à la rédaction d’une nouvelle constitution et organise, en octobre 2000, l’élection présidentielle. Les candidatures de Henri Konan Bédié et d’Alassane Dramane Ouattara sont éliminées par la Cour suprême, et le général Robert Guéï s’autoproclame vainqueur du scrutin.
La population en colère manifeste et chasse Robert Guéi du pouvoir (il sera assassiné en septembre 2002, dans des circonstances non encore élucidées). En novembre 2000, la Cour suprême proclame les résultats et déclare Laurent Gbagbo (Front populaire ivoirien, FPI) vainqueur. Pour tenter de désamorcer la crise, il initie un forum de réconciliation nationale puis nomme un gouvernement d’union nationale. Mais les tensions politiques et ethniques s’accentuent. Le pays sombre dans la guerre civile. Divisé en deux, entre un Nord majoritairement musulman contrôlé par les forces rebelles et un Sud chrétien plus proche du gouvernement, il menace d’imploser. La xénophobie se développe et touche en particulier les ressortissants burkinabès accusés d’aider les rebelles qui, pour partie, partagent leurs origines et religion.
En septembre 2002, des soldats rebelles prennent le contrôle des villes de Bouaké et Korhogo, situées dans le centre et le nord du pays, mais échouent dans leur conquête de la capitale. Le sud est alors tenu par les Forces armées nationales de Côte d’Ivoire et le nord par les Forces nouvelles. La France, dont les intérêts et ressortissants sont nombreux dans le pays, déploie d’importants efforts diplomatiques pour résoudre la crise.
En 2003, 10 000 casques bleus de l’ONUCI dont 4 600 soldats français de la force Licorne – dont la présence jusqu’en 2007 et les actions attiseront le sentiment anti-français au sein d’une partie de la population – sont placés en interposition entre les belligérants. De nombreux pourparlers sont initiés et couronnés par plusieurs accords dont ceux de Linas Marcoussi (France) et Lomé (Togo 2003) qui aboutissent à un précaire cessez-le-feu.
l’accord de paix accepté par Laurent Gbagbo, en janvier 2003
Le 4 mars 2007, à Ouagadougou, sous l’égide du président burkinabè Blaise Compaoré, un nouvel accord de paix est trouvé entre le gouvernement et les rebelles. Guillaume Soro, le leader des Forces Nouvelles, est nommé Premier ministre d’un gouvernement d’union nationale, poste qu’il occupe encore aujourd’hui. Ce gouvernement, au delà des missions habituelles, est chargé de coordonner la mise en œuvre du processus de sortie de crise, qui passe par le désarmement des anciens belligérants, la réunification du pays et l’organisation via la Commission électorale indépendante (CEI) d’élections libres et transparentes.
Officiellement, le mandat présidentiel de Laurent Gbagbo s’est achevé en 2005. Cinq ans plus tard, et après de multiples reports, il demeure au pouvoir. Jeudi dernier, le Premier ministre, Guillaume Soro, suivant l’avis de la CEI, a annoncé que les élections présidentielles se dérouleraient ce 31 octobre 2010. Quelques jours plus tôt, les Forces nouvelles, l’opposition et des organisations de la société civile avaient mis en garde contre les risques auxquels le pays serait exposé si l’élection ne se tenait pas d’ici octobre. Une échéance capitale pour l’avenir de la République de Côte d’Ivoire.
Candidat à l’élection présidentielle de 2010, il est élu président de la République avec 54,1 % des voix selon la commission électorale indépendante et la quasi-totalité de la communauté internationale. Il exerce pleinement ses fonctions de chef d’État depuis l’arrestation de Laurent Gbagbo, qui refusait de quitter le pouvoir. Son investiture, qui officialise cet état de fait, a lieu le 21 mai 2011. Réélu en 2015, sa succession attise les convoitises et laisse le pays sous tension.
Côte d’Ivoire : 57 ans d’indépendance mais une situation toujours instable