Abidjan - Bataille judiciaire au sein du parti de Gbagbo, coups de poing échangés entre cadres de la formation de Bédié : deux des trois principaux partis de Côte d’Ivoire ont affiché ouvertement leurs divisions jeudi, à dix mois de la présidentielle de 2015.
Seules les troupes du chef de l’Etat se montrent pour l’instant unies derrière leur leader, Alassane Ouattara, arrivé au pouvoir en 2011 après cinq mois de crise, qui se pose en favori du prochain scrutin.
La Côte d’Ivoire sort d’une décennie de crise politico-militaire, qui a culminé avec les violences post-électorales de 2010-2011 ayant fait plus de 3.000 morts. La réussite de la présidentielle d’octobre 2015 est jugée primordiale pour la stabilité du pays.
Mais deux des trois principaux partis du pays se présentent en ordre dispersé à dix mois de cette échéance, faisant craindre un scrutin houleux.
Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) se savait en difficulté depuis que son dirigeant Henri Konan Bédié avait appelé en septembre à soutenir M. Ouattara. La consigne, qualifiée de "forfaiture" par un cadre du parti, rencontrait une forte hostilité en interne.
Les divergences sont apparues au grand jour jeudi, à l’occasion d’un bureau politique du PDCI, censé définir la stratégie de cette formation pour la prochaine présidentielle.
"Nos paroles, nos actes et nos gestes doivent être empreints d’une grande lucidité et d’une grande sagesse", a exhorté Henri Konan Bédié lors d’un bref discours d’ouverture aux 650 cadres réunis au siège du parti.
Moins de cinq minutes après ce message, une bousculade débutait dans l’énorme salle de conférence accueillant les débats. Des coups de poing étaient échangés, vraisemblablement entre partisans et opposants à la ligne du dirigeant du PDCI.
Un cadre était une heure plus tard exclu manu militari de la réunion, à grands renforts de cris.
Président de la République de 1993 jusqu’au putsch de 1999, M. Bédié est un partenaire-clé de M. Ouattara, dont il avait permis l’élection en 2010 à la faveur d’une alliance au second tour.
Combat en justice
Plusieurs candidats ont contesté son autorité en décembre. Bertin Kouadio Konan, dit "KKB", un député PDCI, s’est d’ores et déjà déclaré candidat à la présidentielle.
Amara Essy, un ancien ministre des Affaires étrangères, et Charles Konan Banny, ancien Premier ministre et baron du PDCI, sont de leur côté candidats à l’investiture interne.
La situation semble presque pire au Front populaire ivoirien (FPI), le parti de l’ex-président Laurent Gbagbo, dont les luttes internes ont été portées devant les instances judiciaires d’Abidjan.
Là encore, deux camps s’opposent. Le premier, qui fait de la libération de l’ancien président ivoirien "le coeur de la stratégie de lutte du parti", veut voir M. Gbagbo désigné à la tête du FPI bien qu’il soit emprisonné depuis trois ans à la Cour pénale internationale pour "crimes contre l’humanité".
Le second soutient l’actuel patron du parti Pascal Affi N’Guessan, opposé à l’ex-chef de l’Etat dans ces élections internes, qui souhaite participer à l’élection de 2015 sous la bannière de la principale formation d’opposition.
Mercredi, M. N’Guessan a remporté le premier round du combat judiciaire. La justice a confirmé l’interdiction à sa demande d’un congrès du parti, qui devait se tenir du 11 au 14 décembre à Abidjan.
Cette même justice a fait savoir jeudi qu’elle statuerait le 26 décembre sur une autre demande d’"Affi", qui souhaite voir invalider la candidature de Laurent Gbagbo à cette élection.
L’ancien président sera jugé en juillet 2015 par la CPI. La lenteur du processus judiciaire à La Haye rend impensable l’idée même de sa participation à la présidentielle de 2015.
jf/de
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