Certains l’accompagnent depuis des années. D’autres ont tenté des incursions au sein du parti présidentiel avant de faire amende honorable. Enquête sur ces hommes et ces femmes qui gravitent autour de l’ancien chef de la rébellion, Guillaume Soro et qui, ces derniers mois, ont resserré les rangs.
Ils n’auraient manqué ça pour rien au monde. Ce 22 octobre, Guillaume Soro fait son grand retour en Côte d’Ivoire après deux mois d’absence. Dans un salon privé de l’aéroport international Félix-Houphouët-Boigny d’Abidjan, une cinquantaine de personnes attendent le président de l’Assemblée nationale. On discute bruyamment, on se congratule. Au premier rang, formant une sorte de haie d’honneur, sa garde rapprochée, prête à accueillir celui qu’ils appellent le PAN, Bogota (son nom de code du temps des années de lutte estudiantine) ou même le leader éclairé.
Il y a là ceux qui l’accompagnent – fût-ce par intermittence – depuis des années : Sindou Meïté, Alain Lobognon, Sidiki Konaté, Moussa Touré, Affoussiata Bamba Lamine ou encore Fatoumata Traoré Diop. Même le colonel Issiaka Ouattara, dit Wattao, a tenu à marquer sa présence. Lui ne se tiendra pas au côté de Guillaume Soro lorsque celui-ci s’adressera à la presse quelques minutes après son arrivée. Mais il sera à la réunion improvisée dans la soirée au domicile de Soro, à Marcory.
Garde rapprochée « nébuleuse » et hétéroclite
S’il règne, ce jour-là, une telle effervescence, c’est que depuis plusieurs semaines l’ancien chef de la rébellion est au centre de toutes les attentions. Les tensions avec le chef de l’État se sont accentuées, attisées par leurs entourages respectifs et renforcées par l’arrestation, à la mi-octobre, du chef de protocole de Soro, Souleymane Kamagaté Koné (alias Soul to Soul), accusé de « complot contre l’autorité de l’État ». Les liens entre les membres de la galaxie qui gravitent autour de Soro se sont du coup resserrés. Quand les temps sont durs, mieux vaut savoir sur qui l’on peut compter.
Au fil des années et des postes qu’il a occupés, Guillaume Soro, 45 ans, s’est constitué un cénacle hétéroclite. Une garde rapprochée que ses détracteurs qualifient volontiers de « nébuleuse », avec laquelle il aime échanger jusque tard dans la nuit et où les rôles ne sont pas forcément très bien répartis. Très secret, Soro aime cloisonner les différents cercles qui l’aident à concevoir sa stratégie. Il y a des politiques, des communicants, quelques hommes d’affaires et (surtout) des militaires. Il y a ceux qu’il expose et ceux qu’il protège.
La communication donne parfois un sentiment de cacophonie
Beaucoup furent des cadres de l’ancienne rébellion des Forces nouvelles. Vieux camarade de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci), un temps proche de la mouvance des Jeunes Patriotes, Sidiki Konaté accompagne ainsi Soro depuis les négociations interivoiriennes de 2002. Proche des confréries musulmanes, le président de la Commission défense et sécurité de l’Assemblée nationale, devenu député de Man (Ouest) sous la bannière du Rassemblement des républicains (RDR), mobilise pour lui ses réseaux politiques et religieux.
L’ancien journaliste et directeur général de Nord-Sud Quotidien, Sindou Meïté, détermine avec Soro la ligne à adopter dans les médias. Mais l’articulation de la communication donne parfois un sentiment de cacophonie et fait régulièrement l’objet de tensions internes.
C’est le cas entre Moussa Touré, un fidèle chargé de la communication officielle à l’Assemblée nationale, et l’ancien ministre Alain Lobognon, qui a longtemps été le visage médiatique de la galaxie Soro. « Il a parfois été reproché à Moussa de parler de sujets qui ne le concernaient pas », explique un proche du PAN.
Ancienne porte-parole des FN de retour dans le giron de Soro depuis sa défaite aux dernières législatives et sa sortie du gouvernement, Affoussiata Bamba-Lamine s’est également vu confier la tâche de s’exprimer dans les médias. À noter que, comme elle, Sidiki Konaté s’était rapproché de la direction du RDR avant de revenir auprès de Soro et de faire amende honorable.
Deux autres femmes occupent une place essentielle dans le dispositif de Guillaume Soro. La première, Fatoumata Traoré Diop, fut sa conseillère politique lors de la rébellion. Ancienne directrice de la RTI et ex-membre de la commission électorale, elle échoua par deux fois, en 2011 et en 2016, à se faire élire député à Bouaké.
Un temps en froid avec Soro, elle est désormais chargée de mobiliser les sympathisants sur le terrain, tout comme Célestine Tazere Olibe. Celle-ci occupe une place un peu particulière : militante du RDR, elle fut nommée vice-présidente de l’Assemblée nationale après les élections législatives de 2011. Originaire d’Issia, un fief bété de l’ouest du pays, elle s’est rapprochée de Soro sur le tard, et c’est sans doute ce qui explique la défiance que lui manifeste encore une partie de l’entourage du PAN.
2020 : surexposition
Le cas de Tazere est symptomatique de la volonté de Guillaume Soro d’élargir sa galaxie pour donner corps au renouvellement de l’espace politique qu’il prône. Car même si la situation est trop incertaine pour que l’on se hasarde à dire s’il sera candidat en 2020, l’intéressé s’y prépare sérieusement depuis 2011.
Persuadé que les réseaux sociaux – où il est lui-même très actif – joueront un rôle déterminant, il s’est très tôt entouré d’une équipe de jeunes communicants chargés d’animer son site internet, sa web TV et ses différents comptes. Une surexposition vouée à compenser la faible couverture que lui consacre la télévision publique ivoirienne. Soucieux de son image, Soro a également lancé une ONG, La Vie, dont la direction a été confiée à son frère Simon et qui multiplie les activités caritatives...
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