Nouvelle journée d'audience du procès de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé jeudi 9 novembre à La Haye. Depuis mardi 7 novembre, l'ancien commandant des forces terrestres, Firmin Detoh Letoh, est à la barre pour témoigner sur la crise de 2010-2011. Ce haut responsable militaire faisait partie des hommes clés du régime de Laurent Gbagbo. Detoh Letoh était aussi aux commandes des opérations militaires pour la ville d'Abidjan pendant quelques mois, avant finalement, de basculer dans le camp d'Alassane Ouattara. Interrogé par les avocats de Laurent Gbagbo, ce personnage a dû expliquer les conditions dans lesquelles il a témoigné à la CPI.
Pour Detoh Letoh, ce procès est une tribune. Cela lui permet de clarifier son état d’esprit au moment où il bascule dans le camp d’Alassane Ouattara, le 31 mars 2011.
« Beaucoup m’ont traité de fuyard », regrette-t-il. Mais « je voulais que la guerre cesse, assure Detoh Letoh, je savais que nos éléments sur le terrain n’avaient plus de moyens. »
Une fois à l’hôtel du Golf, Alassane Ouattara décide de le maintenir dans sa fonction de commandant des forces terrestres. Il a occupé cette position jusqu’au 7 juillet 2011. Detoh Letoh décrit avec beaucoup de sobriété ce changement de camp : « Je sortais rarement. J’avais le droit de sortir, mais vu le contexte, je ne pouvais pas sortir à tout moment », explique-t-il.
La défense lui demande ensuite de s’expliquer sur ses premiers contacts avec le bureau du procureur courant 2011. « Le bureau du procureur vous a-t-il fait une promesse en échange de votre témoignage ? demande Me Emmanuel Altit, l'avocat principal de Laurent Gbagbo. Non, vous m’offensez, s'emporte Detoh Letoh. Je ne suis pas quelqu’un que l’on corrompt ».
« Vous a-t-on informé que vous étiez susceptible d’être poursuivi par la Cour ? », poursuit Me Emmanuel Altit.
« Non, c’est bien le contraire. Ils m’ont dit que je devais être protégé », explique le militaire à la retraite. Detoh Letoh, qui revient à la barre, sur ses réticences de départ, évoquées en 2011 avec l'équipe de la CPI.
« Nous avons constaté que nous n’avons jamais vu que l’enquête était menée aussi chez les gens d’en face. Il n’y a rien de caché. Si les enquêteurs avaient rencontré les autres, on l’aurait su. Il y a une injustice parce que nous étions harcelés. »
La CPI insiste sur l'impartialité de la procédure. Le procureur Fatou Bensouda assure que son bureau enquête de manière « intensive » depuis 2015 au « sujet des forces pro-Ouattara ».
Côte d’Ivoire: la posture délicate de Detoh Letoh devant CPI - Photo à titre d'illustration