Côte d'Ivoire : usagers et transporteurs jugent «très élevé» le péage sur l'autoroute du Nord

  • 16/05/2014
  • Source : APA
Le péage sur l’autoroute du Nord reliant le Sud au Nord de la Côte d’Ivoire, ouvert, jeudi après-midi, par le Premier ministre Kablan Duncan, est jugé « très élevé » par les usagers et transporteurs de cette voie où le trafic routier est dense.

Mardi, lorsque le gouvernement fixait, officiellement, le coût du péage à 2 500FCFA pour les véhicules personnels , 5 000 FCFA pour les minicars de transport de 20 places contre 7 500 FCFA pour les cars de 70 places et 10 000FCFA pour les véhicules poids lourds, il s'était empressé d'ajouter que c'était « les tarifs les plus bas du monde ». Un commentaire de trop, selon les transporteurs et usagers de la route qui estiment que c'est une grosse « escroquerie de l'Etat » avec ces « prix très élevés » qui n'ont rien à avoir avec « ceux pratiqués » dans la sous-région.

Même l'appel à la solidarité lancé, mardi, par le ministre des infrastructures économiques, Patrick Achi pour « l'acceptation de ces tarifs » en sollicitant « la participation des usagers à l'élan de reconstruction nationale par leur adhésion massive au péage », la pilule est « difficile » à prendre. « Le gouvernement veut nous asphyxier avec ces tarifs » lance dans un excès de colère, Mamadou Traoré, transporteur sur la ligne Abidjan-Bouaké. «Si nos syndicats qui mangent avec le gouvernement ont accepté ces prix, ils nous trouveront sur leur chemin », menace-t-il.

Pour Pascal Kouadio, également, transporteur, ce sont les passagers qui «prendront» le pot cassé car, selon lui, «une augmentation du prix du transport » n'est pas à exclure sur « le tronçon concerné par le péage ».

« On ne peut pas nous imposer 7 500 FCFA par passage au pont de péage et garder les mêmes tarifs, ça, nous ne l'accepterons pas » se plaint M. Kouadio. Selon Yves -Romuald Assiéhoussou, cadre à la fonction publique, « c'est à une vaste opération de paupérisation des populations que l'Etat vient de se livrer ».

« A titre de comparaison, au Burkina Faso, de la frontière à Ouagadougou, le péage coûte 1400 FCFA par passage. Au Ghana, c'est 300 FCFA contre 500 FCFA au Togo. Vous voyez la marge et on parle de plus bas tarifs dans le monde », s'indigne-t-il.

M. Assiéhoussou poursuit pour expliquer que le principe du péage repose sur deux systèmes distincts à savoir « le système de péage dit ''fermé'' et celui dit ''ouvert''».

«Dans le premier cas, le client acquitte un péage en fonction de son point d'entrée et de sortie du réseau et pour l'ouvert , le client acquitte un péage forfaitaire correspondant à l'usage d'une section du réseau d'autoroutes située en amont ou en aval de la gare de péage » explique-t-il, interrogeant si « c'est le cas pour l'autoroute du Nord ».

« C'est un scandale ! » s'écrie Youssouf Konaté, syndicaliste qui « désapprouve aujourd'hui et demain ces prix fixés sans une réelle concertation des acteurs du transport ». Pour Mme Joséphine Tra Lou « le gouvernement veut nous tuer, nous qui sommes dans le commerce du vivrier ».

« Avec ces prix, les transporteurs vont nous imputer le paiement du péage si nous voulons acheminer nos produits à Abidjan. Calculez un peu si on doit faire plus de deux passages par jour sur le tronçon », interroge-t-elle, entre deux soupirs. Selon des sources proches du Haut conseil du patronat des transporteurs, ces mesures sont « abordables » en tenant compte des mesures d'accompagnement « négociées avec le gouvernement».

«Que les transporteurs sachent que nous revenons de loin. C'est vrai, nous avions proposé des tarifs légèrement en dessous de ceux que l'Etat a communiqué mais il faut reconnaitre aussi, c'est le gouvernement qui a le dernier mot après les négociations » souligne un membre dudit conseil, sous le couvert de l'anonymat. Selon lui, le gouvernement est venu à la table de négociations avec le patronat pour des tarifs allant de 10 à 30.000 FCFA comme droit de péage sur l'autoroute du Nord.

«C'est au prix de plusieurs discussions qu'il a fixé les coûts de 2500 F, 5000 F, 7500 F et 10.000FCFA soit pratiquement, des abattements de plus de 50%. Et puis il y a des mesures d'accompagnement que nous avons obtenues et qu'on attend l'application pour saluer définitivement ces tarifs du gouvernement » se satisfait l'interlocuteur de APA. A l'en croire, les mesures d'accompagnement vont de la fluidité de l'autoroute du Nord (plus de barrages routiers) à la réduction des différentes taxes de transport en passant par l'assainissement du secteur du transport ainsi que la construction de nouvelles routes et la réhabilitation des existantes…

Pour le gouvernement, dans « un contexte post-crise et en vue de bâtir une économie émergente » qui passe par «une stratégie de développement des infrastructures », cette mesure était « nécessaire », explique le ministre des infrastructures économiques, Patrick Achi.