La problématique des ex-combattants "Dozo" continue de capter l'attention en Côte d'Ivoire où des mesures visant ces chasseurs traditionnels et anciens combattants de la crise armée sont annoncées.
Plus d'une fois, ces ex-combattants ont été au centre de critiques parfois virulentes, les accusant de violences. Ces critiques ont été exacerbées par des accrochages parfois meurtriers enregistrés dans le courant du mois de février entre Dozo et forces de sécurité ivoiriennes (gendarmes et policiers) à Yamoussoukro (centre).
A l'occasion de la cérémonie de remise des kits de marquage d'armes le 26 mai au siège de la Commission nationale de lutte contre les armes légères en Côte d'Ivoire (ComNat-Alpc) à Abidjan-Cocody, le directeur de cabinet du ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et de la Sécurité, Daniel Bamba Cheick, a déclaré que "l'opération de désarmement des Dozos va démarrer très bientôt ".
M. Bamba Cheick a exhorté les partenaires du pays à l'accompagner en vue de la réalisation dudit projet. "Déjà en 1998, 44.000 Dozos étaient recensés en Côte d'Ivoire. Plus de 10 ans après, on imagine que la tâche ne sera pas facile en raison de leur nombre de plus en plus important", a-t-il fait remarquer.
L'ONU PREOCCUPEE
La question des chasseurs traditionnels Dozos constitue également une préoccupation pour l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci).
Dans un rapport publié en décembre dernier, l'Onuci avait réclamé la fin de l'impunité pour les Dozos, supplétifs des forces pro-Ouattara, accusés de graves violations des droits de l'homme.
La mission onusienne a qualifié la question des Dozos de "phénomène social préoccupant" et s'est félicité de ce que le gouvernement ivoirien soit décidé à le "gérer dans la transparence".
"Nous avons un projet cohérent sur la table et les discussions seront engagées avec les autorités pour voir par quelle porte d'entrée nous pouvons le traduire dans sa réalité", avait déclaré le Représentant spécial adjoint du Secrétaire général de l'ONU en Côte d'Ivoire, Arnauld Akodjenou.
Le ministère ivoirien de l'Intérieur a réagi à ce rapport, faisant des propositions. "Ce problème est véritablement pris à bras le corps par le gouvernement et les solutions qui sont envisagées, si elles sont rapidement mises en oeuvre, peuvent conduire à des lendemains pacifiés au niveau électoral, mais c'est le financement qu'on attend maintenant pour démarrer", a indiqué le directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur Daniel Bamba Cheick lors d'une plate-forme d'échanges.
"Il faut la sensibilisation, l'information, une logistique importante dans le projet", a-t-il ajouté.
MAUVAISE CAMPAGNE ?
A plusieurs occasions, des responsables des "Dozo" ont indiqué que la confrérie est victime d'une campagne malveillante.
"Il y a beaucoup de faux Dozo qui se sont infiltrés parmi nous et qui commettent des exactions. Nous, les vrais Dozo, nous agissons dans une action de protection des populations", a confié samedi un responsable sous couvert de l'anonymat.
De son avis, il leur appartient de mettre de l'ordre dans leur rang afin d'extirper les mauvais grains.
LE GOUVERNEMENT INITIE UNE IDENTIFICATION
Le gouvernement ivoirien a initié une identification des ex-combattants nordistes "Dozo" qui avaient pris part aux affrontements post-électoraux dans le pays, afin d'éviter "des dérives sécuritaires.
Pour Daniel Bamba Cheick, les autorités entendent par cette opération de recensement mettre de l'ordre au sein de la confrérie Dozo considérée par certains comme une milice tribale à la solde du pouvoir.
"Il n'est pas normal que dans un pays l'on trouve des hommes en armes ne relevant d'aucune autorité. Il y a lieu de mettre en place une organisation, et ceux qui ne vont pas se conformer à la réglementation seront traités comme des bandits", a prévenu M. Bamba Cheick.
De nombreux chasseurs traditionnels Dozo venus du nord du pays avaient combattu aux côtés des forces pro-Ouattara comme supplétifs contre les forces pro-Gbagbo au plus fort de la crise post-électorale.
Après l'offensive et la victoire du camp Ouattara, ces ex-combattants se sont installés dans plusieurs villes du pays où ils constituent des forces autonomes.
Le nombre de ces hommes armés est estimé à 120 000 répartis sur l'ensemble du territoire, et ce phénomène crée souvent la polémique.
Leur présence est parfois décriée par certains habitants qui leur reprochent de commettre des exactions et de se substituer aux forces légales que sont la police et la gendarmerie.
D'autres habitants en revanche apprécient l'action des ex-combattants Dozo, faisant état de leur bravoure sur le plan de la lutte contre l'insécurité.
Pour les autorités ivoiriennes, il n'y a pas lieu de dissoudre les Dozo mais de les organiser pour qu'ils exercent dans un cadre légal, et également pour éviter des intrusions dans leurs rangs.
Selon certains observateurs, c'est souvent face à l'insuffisance de l'appui sécuritaire étatique que les Dozos, supposés détenir des pouvoirs mystiques les rendant invincibles par les balles, se retrouvent partout en Côte d'Ivoire et sont impliqués dans les opérations de sécurité normalement dévolues à la police et la gendarmerie.
En revanche, d'autres observateurs estiment qu' "il y a un temps pour tout" et que "le temps de la restauration de l'autorité de l'Etat sur tout le territoire à travers l'action des forces légales est arrivé".
Photo à titre d'illustration