Ce n'est pas le plus connu des anciens chefs de la rébellion, mais c'est sans doute l'un des plus respectés. Nommé à Bouaké, une ville réputée frondeuse, il va avoir fort à faire.
Tuo Fozié se souviendra longtemps du 19 septembre 2002. Parce que ce jour marqua le début de la rébellion ivoirienne, mais aussi parce qu'il faillit y perdre la vie. Ce soir-là, des centaines d'hommes en armes tentent de s'emparer de casernes à Abidjan. Le coup d'État a beau avoir été préparé pendant de longs mois entre la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso, c'est un échec. Les putschistes se lancent dans un repli désorganisé. Parmi eux, Tuo Fozié, un adjudant des Forces armées nationales de Côte d'Ivoire (Fanci). Non loin du camp d'Agban, il essuie des tirs, mais les assaillants ratent leur cible. Fozié parvient à rassembler ses éléments et à gagner Bouaké.
Nommé ce 6 août préfet de la grande ville du Centre et installé dans ses fonctions le 22, Fozié n'est pas le plus connu des anciens chefs de la rébellion. Il fut pourtant le premier porte-parole du Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire (Mpci, l'ancêtre des Forces nouvelles, les Fn). Les Ivoiriens découvrent son visage sur les écrans de télévision quelques jours après le coup d'État manqué. Il y apparaît aux côtés du sergent Chérif Ousmane et prononce pour la première fois à l'antenne le nom de leur leader, Guillaume Soro. Ils le reverront le 17 octobre 2002, vêtu d'un tee-shirt rouge et d'une veste de treillis sans manches, la démarche hésitante, signer sous une cahute de paille le premier d'une longue série de cessez-le-feu. « Fozié fait partie de ceux qui ont installé le système militaire dans les zones Centre, Nord et Ouest [contrôlées par les rebelles après le 19 septembre », explique l'un des cadres des Fn.
Fozié n'est pas non plus le plus médiatique des anciens chefs rebelles. C'est un homme discret à la voix nasillarde, originaire de Nganon, un village situé entre Korhogo et Boundiali, au cœur de ce pays sénoufo mystique, où sa famille est connue et respectée. Particulièrement imprégné de sa culture et de ses racines, ce musulman pieux y possède depuis 2007 une vaste exploitation agricole. il y cultive des fruits, y élève des volailles et organise des formations pour les jeunes de la région.
Combattant respecté, décrit comme proche de ses hommes, Fozié, 55 ans, a toujours été un peu à part au sein de la nébuleuse des Fn. Sous-officier pendant une dizaine d'années, il entame sa carrière militaire au sein du bataillon blindé d'Abidjan puis la poursuit dans le Groupement des sapeurs-pompiers militaires du général Robert Gueï. Bon sprinteur, il intègre la section sports de l'armée ivoirienne et effectuera plusieurs stages au centre sportif de Fontainebleau, en France, comme quelques-uns des grands noms de la rébellion: Ibrahim Coulibaly (IB), Issiaka Ouattara (dit Wattao) et Chérif Ousmane...
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