Déchirure au sein du RHDP: Le RDR fait adopter la loi sur l'apatridie, le PDCI dit NON

  • 21/08/2013
  • Source : Nouveau Reveil

Yasmina OuégninLundi 19 aout 2013: La Comission des Relations Extérieures à laquelle j’appartiens ainsi qu’une quarantaine de députés a entendu les commissaires du gouvernement le Ministre d’Etat, Ministre des Affaires Etrangères et le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice exposer les motifs de 2 conventions relatives à l’apatridie et d’un projet de loi relatif à l’interconnexion électrique Cote d’Ivoire, Guinée, Sierra Leone et Liberia.

Apres plus de 10heures, les conventions ont été adoptées en l’absence de députés Pdci membres de la des Relations Extérieures CRE, à l’unanimité des présents.
La loi adoptée en Commission La convention sur l’apatridie débattue, hier, au parlement
Les députés Pdci votent «Non»

« Le spectacle, il est bel et bien visible. Une fracture se dessine où, d’un côté, le sentiment est donné d’être protecteur de la mère patrie, plus regardant sur les questions de nationalité ; pendant que d’autres sont présentés comme plus gentils et aptes à donner à tout va la nationalité au premier venu». Ce bout de phrase du député Alphonse Soro, du Rdr, montrait bien à lui seul la ligne Maginot qui s’est dessinée, hier au parlement, lors du débat en commission sur le projet de lois visant à autoriser le président de la République à ratifier les conventions de 1954 et 1961. L’une vise à accorder un statut à tous ceux qui sont considérés comme apatrides. L’autre indique les dispositions par les états pour réduire le phénomène. Premier signe de l’intérêt des questions : l’hémicycle a fait presque le plein de ses 255 élus, comme s’il agissait d’une plénière, alors même que les travaux en commission sont habituellement l’affaire des leurs membres. Second Signe : une suspension de trois heures, de 12 heures à 15 heures, n’a pas permis aux cinq groupes parlementaires de s’entendre. a reprise des débats, à 15 heures, a donc montré un parlement divisé en deux. Entre, d’un côté, les élus du Rdr et, de l’autre, le Pdci, l’udpci


et les autres groupes. Quel sera l’impact de cette convention sur la nationalité ? Pourquoi le gouvernement a t il transmis au parlement à la fois les questions de nationalité, du foncier rural et de l’apatridie pour être examinées concomitamment ? Pourquoi un vote dans l’urgence ? Pourquoi pas un référendum ? Le conseil constitutionnel a t il donné son avis ? combien de personnes sont concernées par l’apatridie ? Nombreuses et diverses, ont été les préoccupations dans le camp des élus réticents. e ministre de la Justice et des droits de l’homme, Coulibaly Gnénéma, qu’accompagnaient son collègue des affaires étrangères, Charles Koffi Diby, et celui chargé des relations avec les Institutions, Albert Agré, n’a pas chômé. En lui, il y avait la foi de celui qui plaide pour la bonne cause. Mais ses réponses restaient à caution. Comme par exemple, quand les députés veulent savoir le nombre exact d’apatrides, le ministre dit que le gouvernement n’a pas de chiffres, qu’il ne dit pas que des personnes sont apatrides, mais «il existe des risques d’apatridie en Côte d’Ivoire».


Coulibaly Gnénéma évoque le cas des enfants dans les pouponnières, dans les centres Sos, la liste dite grise produite lors de l’opération d’identification, sur laquelle figurent au moins 500.000 personnes. Il parle des enfants sans papiers, recalés aux examens du cepe, de ceux qui ont perdu tous leurs papiers ou encore de ces autres personnes qui, ayant les leurs, n’ont pas pris le risque de se rendre dans un lieu pour s’identifier en 2007, de peur de s’exposer à une vindicte dans l’hostilité du moment de guéguerre, d’incendie, de casses, qui prévalait. Ils ont préféré préserver leur vie à courir un papier. Quand on lui demande, pourquoi voter maintenant, en session extraordinaire, une convention vieille de plus de 50 ans ? Le ministre répond : «Chaque chose en son temps. C’est le temps de respect des engagements internationaux». alors, y a t il oui ou non, des apatrides en côte


d’Ivoire ? «Tant que nous n’avons pas également le droit, par la ratification de cette convention, il serait hasardeux et même injuste pour nous, de regarder quelqu’un et de par son faciès, dire : lui là, il est un apatride», explique t il. et de préciser : «L’apatridie, c’est l’absence de ien juridique entre un citoyen et un Etat. Ce n’est la possession d’Etat, mais le lien juridique. Le lien juridique, il se prouve par un document authentique. Ce serait a carte nationale d’identité pour ceux qui ont l’âge de l’acquérir, ou, à tout le moins, l’extrait de naissance. Les textes, que nous proposons,, n’ont pas pour Objet de transformer des personnes en nationaux ivoiriens. Non ! Il s’agit de constater légalement, dans un premier temps, avec le statut, que ces personnes à n’ont aucun lien avec aucun Etat. Donc, nous avons l’obligation de leur procurer des documents de circuation, de eur apporter une certaine assistance tant qu’ils sont des apatrides (…) Il y des risques d’apatridie. Ce n’est pas une fiction, c’est une réalité». et pour lui, il s’agit, «non d’en jeux politiques, mais d’enjeux humanitaires». Le hic, c’est qu’à l’ouest où la question du foncier se pose avec acuité, l’accès à la nationalité n’est pas qu’humanitaire, il vaut aussi accès au titre foncier.
Dans le camp Pdci, on reste sceptique, surtout dans l’absence d’arguments chiffrés. «Nous sommes dans le gouvernement du docteur Alassane Ouattara. On ne peut pas venir avec des à peu près», martèle Sarr Bohé Larius. «C’est notre vie qui est en jeu», prévient le député Déhé Paul de Taï, une zone sous les feux récurrents des conflits fonciers. «Ce qui touche à a nationalité touche au listing électoral et au foncier. Le peuple, à travers une consultation populaire, devrait pouvoir nous orienter dans es deux décisions à prendre», dira le député Brou René. Louis Abonoua propose «une commission paritaire gouvernement parlement pour regarder de près ces deux projets. Au Rdr, on apporte de l’eau au moulin


du ministre. Ali Sangaré, évoque le cas de ‘ex agent américain de a CIA, Edward Snowden, bloqué en Russie et à qui son pays a retiré la nationalité, pour montrer que personne n’est à l’abri de ’apatridie». «Tous les députés ici présents ont des apatrides dans leurs zones», renchérit Koné Boubacar quand son collègue Imbassou Ouattara donne des cas de personnes dont les noms à consonance akan ou malinké sont des sans papiers, donc sont menacés d’apatridie.
Chose inhabituelle, pour un débat en commission : chaque camp applaudit son élu quand il argumente. La présidente de séance, le député du Pdci Assa Bobi, ordonne la fin des applaudissements de part et d’autre. En vain ! n’ayant pu départager les parties, la confrontation qui a duré jusque tard dans la soirée, a donné lieu à un vote en commission des affaires générales et institutionnelles. Selon nos sources, les députés républicains majoritaires ont adopté les deux lois, contre l’avis de leurs collègues du Pdci qui ont voté contre. Les plénières sont prévues pour vendredi prochain.

Benoit Hili