Pour le ministre congolais de l'Économie, les États africains doivent s’atteler à bâtir de vraies économies compétitives, plutôt que de se préoccuper de disposer chacun de sa monnaie. Ce qui ne l'empêche pas de suggérer des évolutions dans la politique monétaire de la zone CFA, notamment le passage de la fixité par rapport à l'euro à une flexibilité contrôlée.
Depuis plus d’un an, il ne se passe plus un jour sans que les Africains de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) ne parlent du franc CFA. Ils le font sous toutes les coutures : mauvaise monnaie, cause des déconvenues économiques, bonne monnaie, garante de la stabilité macro-financière, monnaie aux relents coloniaux, monnaie d’avenir malgré tout, etc.
Ces échanges vifs dénotent, à tout le moins, de l’intérêt qu’ils accordent au devenir économique de leurs pays. Cependant, on peut déplorer le fait que mal ordonné, le débat va dans tous les sens, et on en vient à se demander quel est le vrai sujet qui mérite débat.
Il nous semble opportun de revenir à l’économie et de limiter le débat à trois questions que nous jugeons fondamentales :
- chaque pays d’Afrique a-t-il intérêt à créer et à gérer en toute indépendance sa propre monnaie ?
- une monnaie autre que le franc CFA fera-t-elle le développement des pays qui se trouvent aujourd’hui dans la zone franc ?
- quel régime de change adopter ? Parité fixe ou libre fluctuation ?
1. La monnaie n’est pas à envisager comme l’expression de la souveraineté nationale
La souveraineté d’un pays ne se juge pas à sa monnaie. Une nation, une communauté de personnes sur un territoire, peut disposer d’une monnaie qui lui est propre, sans être souveraine pour autant. A contrario, une nation peut partager une monnaie avec d’autres, sans en avoir le contrôle, et en même temps, disposer des capacités à décider et à agir seule dans plusieurs domaines qui lui confèrent une certaine souveraineté.
La République démocratique du Congo, qui a sa monnaie, n’est pas plus souveraine que la France qui a une monnaie commune. L’inverse est tout aussi vrai. Les États-Unis d’Amérique, avec leur dollar, ne sont pas moins souverains que la République fédérale d’Allemagne, qui a l’euro en partage avec dix-huit autres pays...
Image utilisée à titre d'illustration