Grand-Bassam, la première capitale administrative de la Côte d’Ivoire est menacée par l’érosion côtière. Comme un malheur n’arrive jamais seul, les dernières pluies ont inondé la ville historique et délogé plusieurs habitants. Le dérèglement climatique est l’une des causes du phénomène, mais l’action humaine, notamment l’exploitation anarchique du sable, est tout aussi préjudiciable à l’environnement dans cette cité inscrite au patrimoine mondiale de l’Unesco depuis le 1er juillet 2012.
La bande côtière sablonneuse plantée de cocotiers qui faisait jadis la beauté de l’axe Abidjan-Bassam, 43 kilomètres, pourrait bientôt n’être qu’un lointain souvenir. En plus des opérations immobilières qui poussent tout au long de cette voie, on aperçoit de plus en plus des carrières de sable. Le phénomène est plus accentué à partir du village de Modeste situé à une quinzaine de kilomètres de la ville balnéaire. La belle plage sablonneuse est méconnaissable : une multitude de trous béants, plusieurs cocotiers abattus et brûlés, une piste en argile fend la plage depuis la route goudronnée jusqu’à l’étroite bande de terre qui sépare encore la terre ferme de la mer, pour le passage des camions.
Des bulldozers et des pelleteuses sont abandonnés sur la carrière depuis que le préfet a reçu l’ordre de faire arrêter le ‘’massacre’’ de cette plage. Si l’exploitation de la carrière de Modeste n’avait pas été stoppée in extremis, la petite bande de terre qui retient encore l’avancée de la mer, aurait déjà été emportée par les pelleteuses. La mer se verra ainsi offrir un véritable boulevard pour s’élancer vers la route bitumée toute proche. Un peu plus loin, à l’entrée du village artisanal, derrière l’ancienne ‘’Aboutou poterie’’, aujourd’hui centre d’argilo-thérapie, la bande de terre qui surplombe la lagune toute proche, a été taillée. Une importante quantité de sable en a été extraite, avant que la mairie n’ordonne l’arrêt immédiat de cette exploitation. Pour Pierre James Ezan qui réclame la propriété de l’espace, il ne s’agit pas de carrière de sable, mais plutôt de travaux pour aplanir son terrain.
Qui ordonne l’exploitation de sable pourtant interdite sur la plage ?
Si les agents techniques de la mairie interviennent souvent pour stopper ces exploitations anarchiques, la municipalité de Grand-Bassam n’est pas l’autorité qui octroie des permis d’exploitation. Le directeur technique de la mairie, M. Jean-Baptiste Ayémou, affirme que seul le ministère des Mines est habilité en Côte d’Ivoire à délivrer des permis d’exploitation de sable. La gestion de la ville historique étant du ressort de la mairie, celle-ci est souvent interpellée par les populations sur la présence de ces carrières. Après constat, elle intervient juste pour faire arrêter l’exploitation. Mais le directeur technique affirme que souvent, ces exploitants brandissent des autorisations du ministère des Mines. S’agit-il de faux permis comme le soutiennent certains habitants de la ville, ou d’authentiques documents comme le clament les détenteurs de ces papiers ? Une source proche du ministère des Mines affirme que le ministère ne donne plus de permis d’exploitation à Grand-Bassam à cause de l’érosion côtière qui fait rage dans cette ville...
Grand-Bassam : Quand les exploitations sauvages de sable mettent en péril la ville historique