Cela faisait exactement 3 jours hier que les taxis-compteurs étaient en grève. Ce débrayage vise à dénoncer : « la concurrence déloyale des véhicules banalisés et leur conséquence sur l’activité des professionnels des transports, la non-application du protocole d’accord signé le 02 novembre 2012 avec le ministère des Transports et les nombreux prélèvements illicites et abusifs effectués à tous les coins de rues par des pseudo-syndicalistes sur les braves conducteurs de gbakas ».
Au-delà des préjudices que ce mouvement de grève des transporteurs cause aux usagers, c’est la cacophonie qui règne au plus haut niveau de l’Etat sur le problème entre taxis-compteurs et wôrô wôrô banalisés qui pose problème. Car, l’incapacité des autorités de tutelle à gérer la question est apparue. Jugez-en vous-même.
Samedi 26 août 2012. Alors que les chauffeurs de taxis-compteurs sont en grève pour dénoncer la concurrence déloyale qui leur est faite par les taxis intercommunaux, le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, de manière unilatérale, sans consulter son collègue des transports, interdit l’activité de transport urbain aux wôrô wôrô banalisés. Naturellement, cette décision est accompagnée par les forces de l’ordre. Mais, cette action brillera plus par son éclat que par sa popularité.
Quelques jours plus tard, le ministre Gaoussou Touré des Transports prend le contre-pied de son collègue de l’Intérieur. Et, Adama Touré, président de la coordination des gares routières de Côte d’Ivoire (Cgrci) le confirme dans une interview parue chez un confrère : « C’est le ministre des transports, qui a autorisé le retour des taxis banalisés. C’est lui qui est à la base du retour des taxis banalisés. Il a pris cette décision au cours d’une réunion à laquelle nous avons pris part ». Ce n’est pas tout.
Le ministère des Transports, le ministère de l’Intérieur, le ministère en charge de la Défense et le ministère de l’Economie et des Finances signent, le 9 juillet 2013, un communiqué conjoint, à la suite d’une rencontre avec les responsables des taxis-compteurs et les propriétaires de véhicules banalisés, fixant les conditions d’exercice de l’activité de transport urbain (avoir la patente, le certificat de visite technique et l’assurance de transport public voyageur). Il était donc prévu dans ledit communiqué, qu’à partir du 15 juillet 2013, les services compétents procéderaient au contrôle des documents administratifs afférents à l’activité de transport. Un communiqué signé pour la forme. Puisqu’à la pratique, on ne verra rien. Conséquence, les taxis-compteurs, se sentant lésés, entrent en grève le 26 août dernier.
Là encore, plutôt que les autorités restent dans la cacophonie. En effet, alors que les taxis-compteurs menacent, le ministre Gaoussou Touré publie sur son mur facebook : « Des approches ont été entreprises par mes services et par le Haut conseil du patronat des entreprises du transport routier de Côte d’Ivoire (HCPETR-CI), pour échanger avec les signataires dudit document à l’effet de surseoir à ce projet (NDLR : la grève des taxis-compteurs). La concertation et la sensibilisation étendues à l’ensemble des acteurs du secteur, a fini par aboutir à un dénouement heureux ». Le membre du gouvernement est tout de même contrarié Et, cette fois, le ministre publie : « …au demeurant, il est à rappeler que ces contrôles (NDLR : des documents administratifs exigés pour l’exercice de l’activité de transport urbain) sont l’aboutissement du dialogue social inlassablement engagé depuis plusieurs mois par le ministre des Transports avec les acteurs en vue d’une solution durable aux différents problèmes qui minent le secteur des transports, notamment la concurrence déloyale livrée par les véhicules banalisés. Je voudrais, par conséquent, rassurer les acteurs de ma ferme volonté à conduire ces opérations en vue de l’assainissement total et durable des transports terrestres ». Mais ce qu’oublie d’avouer le ministre, c’est que pendant que les taxis-compteurs protestent, les wôrô wôrô banalisés exercent tranquillement leur activité. Incapacité des autorités compétentes à gérer la situation ou volonté délibérée d’entretenir la confusion pour des desseins obscurs ? L’avenir nous situera.
Koné Modeste
Grève des Taxis-Compteurs : Confusion au sommet de l’Etat - Photo à titre d'illustration