Jonas Lago: "il faut amener les Etats à appliquer les textes de libre circulation"

  • 01/06/2015
  • Source : Acturoutes
Tirant les conclusions d’échanges à Abidjan lors de la 4e Conférence annuelle de l’Alliance Borderless, une centaine d'experts ont souhaité une évaluation des textes communautaires en matière de libre circulation. Le président du comité de l’Alliance en Côte d’Ivoire, Jonas Lago, précise sur Acturoutes qu’il faut d’abord amener les Etats à appliquer les textes qui existent déjà.

L’Alliance Borderless a choisi pour thème « Commerce régional et sécurité alimentaire », où se situe l’enjeu pour la Côte d’Ivoire ?
La Côte d’Ivoire est un grand pays de production agricole. Nous sommes leader dans la production en cacao et nous avons d’importantes productions dans d’autres cultures comme le riz, l’anacarde, le coton etc. Il est important au niveau des organismes comme l’Alliance Borderless qui plaide pour la libre circulation, avec le soutien de la CEDEAO et de l’UEMOA ainsi que de partenaires comme Scanning System et la Coopération japonaise, de réfléchir afin d’identifier les obstacles sur le circuit de ces produits qui sont le fondement de notre économie. Cette Conférence annuelle en a donné l’occasion. Nous nous sommes accordés sur des pistes de solution et avons recommandé fortement au niveau des organisations communautaires comme la CEDEAO et l’UEMOA et des Etats de se doter de mécanismes pour faire exécuter les règlements et décisions visant à faire lever les obstacles à la libre circulation afin d’accroitre la compétitivité des produits.

Vous avez abouti à une série de recommandations. Laquelle parait prioritaire ?
Touts ces résolutions sont prioritaires. Elles s’entremêlent et sont transversales. Nous avons souhaité le renforcement des statuts juridiques des Postes de contrôle juxtaposés (PCJ) qui sont aujourd’hui des moyens très modernes de facilitation du commerce et des transports au niveau frontalier. Le premier PCJ qu’on a construit à Cinkassé (à la frontière Togo-Burkina Faso) connait aujourd’hui des difficultés à cause de l’interprétation subjective des textes par les populations qui pensent que ces outils d’intégration leur appartiennent. Alors que ce sont des outils communautaires de facilitation. Il est important de multiplier les séminaires pour amener les gens à changer de mentalité et montrer que l’Afrique a besoin de quitter son isolement, d’aller au rendez-vous du donner et du recevoir, d’intégrer le monde universel et entrer dans un marché commun et unifié. Cela passe par une interconnexion des systèmes informatiques et une unicité des monnaies. Rien qu’en zone CEDEAO, nous avons identifié au moins 5 monnaies différentes. Il faut aller rapidement à une monnaie unique.

Etes-vous en train de dire que les outils mis en œuvre pour assurer la libre circulation ont des difficultés pour fonctionner ?

Nous disons que c’est aux Etats d’appliquer les décisions qu’ils prennent avec les communautés (UEMOA et CEDEAO). C’est en cela qu’il faut saluer la contribution de l’Alliance Borderless qui se dote de moyens pour amener les partenaires publics et privés à renforcer le cadre de collaboration et à identifier les pistes pour pouvoir appliquer les décisions qui sont importantes dans le sens de la levées des entraves au commerce.

D’où l’idée d’évaluer les protocoles, comme souligné dans l’une des recommandations...

C’est pourquoi justement il faut évaluer les protocoles. L’idée est d’identifier ce qui n’a pas marché et amener les Etats à appliquer les textes. En ce qui concerne par exemple le règlement 14 de l’UEMOA concernant la charge à l’essieu, dès qu’on a commencé à l’appliquer, des interprétations subjectives naissent. Pourtant ce règlement est clair. Il faut saluer l’Alliance Borderless qui oeuvre à une unicité des interprétations. Il faut aussi lui reconnaitre le mérite d’avoir organisé récemment un atelier sur le TRIE (Ndlr : Transit routier inter-Etats) entre la Côte d’Ivoire et le Mali à Abidjan. Ceci est à encourager et c’est dans ce cadre que nous nous sommes réunis de nouveau ici.

Apparemment il y a une volonté unanime des Etats de lutter contre les entraves au libre-échange. Pourtant les choses bougent très lentement sur le terrain. Où se situe le blocage ?
J’ai proposé en tant que Vice-président de Scannig System qui intervient dans l’ensemble de la Sous-région d’amener les Etats à identifier les obstacles, les difficultés d’application. Et la CEDEAO et l’UEMOA sont appelées à se doter de moyens coercitifs pour « contraindre » les Etats à appliquer les décisions qu’ils prennent.


Interview réalisée par
Célestin KOUADIO