Lyon - Absence quasi générale de gestion des déchets, nécessité d'un meilleur traitement des eaux usées, besoins et potentiel immenses en énergies renouvelables: pour les industriels européens et mondiaux, l'Afrique subsaharienne qui connait une croissance économique forte, est le nouveau marché à conquérir.
Preuve de cet engouement la Côte d'Ivoire est cette année - et c'est une première pour un pays africain - l'invité d'honneur sur le salon Pollutec, dédié à l'économie de l'environnement qui se déroule à Lyon.
Un +espace Afrique+ réunit également des acteurs d'autres pays, comme le Tchad, le Gabon ou le Congo.
Les opportunités sur les projets environnementaux en Afrique sont vraiment énormes. Les principales problématiques sont l'accès à l'eau potable, l'assainissement, le traitement des déchets, à la fois dans les grandes villes mais aussi dans les petites et moyennes, explique Stéphanie Gay-Torrente, la directrice de Pollutec.
L'assainissement collectif n'est réel qu'à Abidjan, partout ailleurs il s'agit d'un assainissement individuel, a ainsi témoigné le ministre ivoirien de l'Environnement et du développement durable, Allah Kouadio.
Et le constat est le même en ce qui concerne les déchets. Aujourd'hui, à part à Abidjan, il n'y a rien hormis des décharges communales, décrit Alphonse Sehi Bi, expert en assainissement auprès de l'Agence nationale ivoirienne de la salubrité urbaine (Anasur).
Un des projets les plus importants du pays vise à renforcer les capacités de collecte et de traitement des déchets ménagers dans cing régions du pays. L'investissement s'élève à près de 14 millions d'euros sur trois ans.
Concurrence internationale
Tous les pays du continent sont soumis aux mêmes défis. L'Agence de développement des entreprises en Afrique (Adea) a ainsi évalué à 40 milliards de dollars par an les investissements nécessaires dans les nouveaux projets dans le secteur de l'eau et à 42 milliards dans celui de l'énergie.
Et ce potentiel aiguise les appétits des industriels du monde entier. Car aujourd'hui, les pays africains, ne peuvent se passer de l'expertise et des investissements des entreprises privées étrangères.
Les technologies, que ce soit dans l'eau, les déchets ou les énergies renouvelables, sont très complexes et nécessitent beaucoup d'investissements et de compétences, explique Abdoulaye Kanté.
Veolia réalise par exemple 1,1 milliard d'euros de chiffre d'affaires en Afrique, principalement générés par l'eau et la distribution d'énergie, indique Patrice Fonlladosa, directeur de la zone Afrique et Moyen-Orient du groupe, présent notamment au Gabon, au Niger, en Namibie et en Afrique du Sud.
Il est également candidat pour plusieurs appels d'offres: au Togo pour un centre d'enfouissement, ou encore en Guinée pour un contrat de performance à l'électricité.
Son principal concurrent, Suez Environnement, est présent sur le continent depuis plus de 60 ans via sa filiale Degrémont, et y réalise aujourd'hui un chiffre d'affaires de 700 millions d'euros.
Et le groupe juge ce marché prometteur et souhaite poursuivre son développement dans l'eau, la gestion des déchets pour le municipal et avec les clients industriels, notamment les secteurs du pétrole, des mines et du gaz, qui ont d'importants besoins.
Veolia a par exemple annoncé mercredi le gain d'un contrat pour le traitement des eaux d'une mine d'or au Ghana.
Et il n'y a pas que les Français. L'Américain Wise Solutions a remporté en juin le contrat pour la collecte et le traitement des déchets dans le district d'Abidjan, la capitale économique ivoirienne.
Les entreprises chinoises font aussi une concurrence farouche aux Européens, avance Abdoulaye Kanté, directeur de l'Adea.
Trouver les financements
Les PME ont aussi des ambitions et ont leur épingle du jeu à tirer car elles peuvent apporter des transferts de compétences rapides, selon M. Kanté.
Inova, société française spécialisée dans la construction d'usines d'incinération et de centrales biomasse a montré son intérêt sur le salon pour les projets ivoiriens.
Nous avons déjà candidaté pour un projet de centrale biomasse dans ce pays et nous sommes en train de nous installer en Algérie, qui pourrait être notre tête de pont vers le reste du continent, explique François Gault, son directeur de mission.
Seule contrainte: trouver des financements pour ces projets, que les pays eux-mêmes ont du mal à boucler. Les organisations multinationales, comme la Banque mondiale, restent donc des bailleurs incontournables, estime Patrice Fonlladosa de Veolia, notamment pour les projets municipaux, dans lesquels la présence de ces bailleurs rassure aussi sur la bonne gouvernance des projets.
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L'Afrique aiguise les appétits des industriels de l'environnement