Perturbée par une grave crise politique lors des années 2000, l’économie ivoirienne revient sur le devant de la scène africaine avec des taux de croissance annuels records et le développement de nouveaux secteurs. L’exploitation des gisements d’or connaît par exemple un succès inédit, favorisé par un État conciliant et un code minier plus commode pour les grandes entreprises. Cependant, l’orpaillage clandestin continue de faire des ravages humains et écologiques.
La Côte d’Ivoire a longtemps négligé son potentiel aurifère. Alors que ces dernières décennies, les voisins burkinabé, malien, et ghanéen en avaient fait une filière stratégique, la Côte d’Ivoire n’avait jamais réellement bonifié ses propres ressources en or. Toutefois, le retour à la normale sur le plan politique s’est accompagné d’un véritable boom économique. Le développement des secteurs traditionnels ivoiriens, comme le cacao, n’est plus le seul relais de croissance. Les minerais, tels que l’or, sont désormais largement exploités et attirent des entreprises des quatre coins du monde. Et le potentiel est là puisque les réserves prouvées sont de l’ordre de 600 tonnes. La manne est importante pour l’État ivoirien qui n’a plus de difficulté à faire venir les investisseurs, d’autant que la refonte du Code minier de 2014 les rassure.
La plupart de ces entreprises sont étrangères, mais des groupes ivoiriens plus petits parviennent à profiter d’une ressource dont l’exploitation est beaucoup plus sûre sur depuis l’entrée en vigueur en 2014 d’un Code minier profondément remanié, qui remplace celui de 1995. La nouvelle version a été saluée par tous les professionnels du secteur, car il définit clairement les droits et obligations des compagnies minières. Il permet donc de dissiper le brouillard légal formé par l’ancienne mouture et qui avait tendance à repousser des investisseurs qui étaient alors contraints de disposer d’un capital de plusieurs millions d’euros avant de démarrer leurs activités.
L’essor de l’orpaillage clandestin
Seul bémol à ce nouveau code minier : l’autorisation de procéder à de l’orpaillage traditionnel. Une activité laissée licite afin de permettre à certains Ivoiriens de boucler leurs fins de mois, dans des zones difficiles d’accès que les grands groupes évitent en raison des coûts d’exploitation trop lourds. Malheureusement, l’orpaillage traditionnel vire trop souvent à l’orpaillage clandestin. De nombreux pailleteurs venus du Burkina Faso et du Mali franchissent la frontière, séduits par le nouveau dynamisme ivoirien.
Les compagnies minières se plaignent de cette concurrence déloyale qui n’est pas soumise aux mêmes réglementations sociales et environnementales. La plus grande compagnie présente en Côte d’Ivoire, Randgold, ne cesse de dénoncer la prolifération des orpailleurs clandestins alors que simultanément, l’entreprise dépense des millions d’euros pour se plier aux normes de modernisation des mines existantes. Une situation qui n’a pas encore refroidi les investisseurs : l’État ivoirien a déjà délivré près de 200 permis d’exploitation, dont les trois quarts correspondent à des gisements aurifères.
Le développement de cette filière illicite est le revers de la médaille d’un secteur en pleine expansion. Le gouvernement ivoirien devra trouver l’équilibre entre le maintien d’une pratique d’orpaillage traditionnel dans certaines régions et la chasse aux chercheurs d’or illégaux. L’État a déjà réagi et depuis 2015, l’augmentation du nombre de contrôles a explosé. Ce sont 142 mines clandestines qui ont été fermées entre 2015 et 2016 et plusieurs dizaines d’arrestations ont eu lieu. Pour préserver cette filière stratégique des pratiques illégales, les autorités n’hésitent pas à impliquer directement les forces de police et les militaires. Une décision salutaire pour protéger un marché prometteur.
Par François Lamontagne
L’or d’un pays en renouveau - Photo à titre d'illustration