Ce 11 avril 2011, c’est aussi une guerre que le Front populaire ivoirien a perdu. Il avait déjà perdu les élections à la date du 28 Novembre 2010. Jusqu’à la date du 31 Mars 2010, la contestation électorale du pouvoir de l’époque pouvait être traitée comme une pure dispute électorale et politique.
Mais lorsqu’il s’est ligué contre la Cedeao, l’Union Africaine et les Nations-Unies, lorsqu’il a bouché toutes les voies de négociation et refusé les compromis, lorsqu’il a contrarié les négociateurs et ses propres alliés, lorsqu’il s’est dressé contre des armées plus fortes que lui, le Fpi a décidé de se suicider.
Perdre une guerre a des conséquences qui ne sont pas les mêmes que perdre une élection et le Fpi doit des explications et des pardons à ses militants pour les avoir exposés à des représailles, qui dans l’ambiance hostile de l’époque, auraient de toute évidence suivi.
Lorsque tous les territoires de la Côte d’Ivoire étaient tombés et que seul le palais présidentiel résistait sur quelques centaines de mètres carrés, les sympathisants FPI étaient volontairement sacrifiés par leurs leaders. Le général qui ne sait pas quand est venu le moment de déposer les armes face à une défaite évidente afin de préserver les vies de ses troupes n’est pas un général. Le Fpi devra un jour expliquer à ses militants pourquoi il a procédé ainsi.
Depuis quelques mois, le Fpi a emprunté des sentiers nouveaux. Face au danger, tout être se bat, s’adapte, fuit ou meurt. Le Fpi se bat avec ses moyens. La vague de libération de ses responsables a donné du tonus au parti. Ses discours, ses choix, ses orientations dénotent d’une volonté de reprendre sa place sur l’échiquier politique national. Les meetings, réunions, conventions, tournées donneront une nouvelle vitalité au parti.
Les militants sortent, s’expriment et se réaffirment. Les sections évanouies se reconstituent et recommencent à occuper le terrain. Pascal Affi Nguessan, président du parti sorti de captivité, joue de diplomatie, de politique, de courage, d’art du langage, d’inventivité pour repositionner le parti. Toute la Côte d’Ivoire devrait apprécier ce Fpi nouveau, car il contribuera au retour de la paix et par-delà au développement de la Côte d’Ivoire.
La démocratie ancienne et moderne est en grande partie bâtie sur la nécessité de l’équilibre des forces dans un Etat, sur la confrontation des idées et la surveillance mutuelle des pouvoirs. Nous ne pouvons pas tous être identiques, la nature elle-même n’a créé aucun être vivant génétiquement identique à un autre.
Avec un Fpi revivifié, la Côte d’Ivoire consacrerait cet équilibre en vue de sa stabilité. Mais le vrai ennemi du Fpi, ce ne sont plus les forces militaires qui l’ont combattu ; ce ne sont pas non plus les forces politiques qui l’ont battu dans les urnes.
Le vrai ennemi du Fpi, c’est le Fpi lui-même, ses militants et ses leaders, dont beaucoup n’ont pas encore compris qu’ils ont perdu le pouvoir et qu’ils devront composer avec la réalité du moment afin d’exister en tant que parti, de saisir les délicatesses et subtilités de ce moment pour bâtir des stratégies efficientes de retour éventuel au pouvoir.
Affi N’guessan pourrait donc être confronté à cette absence de « conscience de la réalité » de sa base. Certaines propositions formulées lors de la dernière convention du Fpi en sont la preuve.
Lorsque viendront les opérations électorales, notamment l’opération d’inscription sur les listes électorales et lorsqu’il faudra prendre des options courageuses pour la participation aux différents scrutins, le fossé pourrait se creuser entre Affi Nguessan, les militants et le fondateur du parti emprisonné à l’étranger. Le Fpi devra, encore une fois, faire des choix difficiles dont la sagesse définira s’il a réellement choisi de renaître et de revenir sur le podium.
Par VINCENT TOHBI IRIE
Le Fpi nouveau - Photo à titre d'illustration