La Côte d’Ivoire après le décès du Président Félix Houphouët-Boigny en 1993, a connu quatre leaders politiques majeurs qui ont dominé et dominent encore la vie politique ivoirienne. Le président Henri Konan Bédié, Président de l’Assemblée Nationale, dauphin constitutionnel. Le premier, premier ministre de Côte d’Ivoire, président du comité interministériel. Le premier ministre Alassane Ouattara, pratiquement dauphin institutionnel, le chef d’Etat major de l’armée ivoirienne, le Général Robert Guéi, gardien du temple et le professeur Laurent Gbagbo, leader de l’opposition ivoirienne. Ces quatre personnalités ont dominé la scène politique ivoirienne. Si bien que les antagonismes entre ces quatre personnalités ont crée une sorte de cristallisation et de radicalisation de part et d’autre des camps. Cela nous a conduits, des années plus tard à une forme de scission au sein de la société ivoirienne.
Mais il y a deux choses à retenir. La première, c’est que les quatre personnalités sont pratiquement de la même génération. Elles étaient en train de terminer un cycle politique. Chacun d’eux a été chef de l’Etat. C’est donc une génération d’ivoiriens qui est en train de partir. Il y a une Côte d’Ivoire qui a régné et qui est en train de partir. Et il y a une Côte d’Ivoire qui est en train d’émerger. Il s’agira donc, à partir de la fracture que la Côte d’Ivoire a connue en septembre 2002, de poser inévitablement les bases d’une recomposition de la classe politique, sinon un renouvellement du personnel politique. Et puis jeter les bases de l’édification d’une nation à travers une génération qui arrive. Malheureusement, par la faute des aînés, mais des jeunes que nous sommes.
Nous avons donc été obligés d’utiliser des moyens qui étaient en notre possession pour faire entendre la voix de cette jeunesse qui voulait absolument prendre part au débat politique. Le 19 septembre 2002, est au-delà de sa dimension tragique qu’on lui connaît, le départ dans ses fondamentaux, d’une Côte d’Ivoire qui est en train d’émerger. On est obligé de prendre cela en compte dans ce renouvellement politique. Mais le plus important n’est pas de savoir ou de dire que nous sommes en train de vivre un changement à l’intérieur de la Côte d’Ivoire. Le plus important c’est de savoir comment ce changement se fait et avec qui il se fera ? Parce que de toute évidence, le combat Ouattara, Gbagbo, Bédié, Guéi, est un combat d’une génération qui elle-même est obligée de passer le flambeau à une autre génération.
Si nous observons et nous analysons la vie politique ivoirienne sous cet angle, nous aurons compris et nous aurons aidé la Côte d’Ivoire. Mais si nous voyons cela sous l’angle seulement partisan, nous n’aurons rien compris. Donc les soubresauts qui ont lieu à l’intérieur des différents partis politiques augurent de l’ère du changement. Donc le point de départ, le plus fort et le plus marquant a été donc cette fracture assez brutale qui s’est produite en septembre 2002. Mais encore, faut-il que cette génération à qui on passera le flambeau comprenne qu’il s’agit d’une recomposition de la classe politique, d’un renouvellement du personnel politique.
Est-ce que les jeunes sont près ? C’est la grande question. Parce que, nous sommes en train d’assister à la fin d’un cycle et à la naissance d’un autre. Comment ce changement va-t-il se faire ? Il faudrait que nous ayons de la sagesse pour ne pas qu’une nouvelle fracture advienne. Il faut que tous les ivoiriens soient unis pour avancer et qu’on ne crée pas une république de frustrés. Qu’il y ait des personnes mises à l’écart par rapport à l’évolution de la société. Et c’est ensemble qu’on pourra avancer en se pardonnant.
Le regard de Claude Sahi (consultant international) : ‘’ Il y a une nouvelle Côte d’Ivoire qui est en train d’émerger’’ - Photo à titre d'illustration