Les Samedis de Biton : Abidjan est grand

C’était le nom d’un célèbre maquis. A Marcory. Pendant longtemps il a symbolisé, pour moi, l’image de l’échec. Quelque chose qui marchait bien et qui sombre avant de disparaitre. Comment un grand succès devient un échec ? Et cela à tous les niveaux. Aujourd’hui, les ‘’Abidjan est grand’’ reviennent avec force dans tous les quartiers. C’est la résurrection. Nous sommes en plein dans le boom de l’alimentation à Abidjan. Salif Kéita dans une de ses chansons disait que l’Afrique c’est manger beaucoup, c’est boire beaucoup, c’est danser beaucoup. La chanson semble convenir, plus que jamais, à la ville d’Abidjan. Ce sont des artistes venus de la sous région, en visite à Abidjan, qui vont me donner l’envie d’écrire cette chronique. Parti rendre visite à l’un d’eux que je connais, la plupart d’eux m’interpellèrent de la même manière. « On dit que l’argent ne circule pas à Abidjan mais la nourriture circule très fort. » Leur conclusion est sans recours. Si les gens mangent aussi beaucoup c’est que l’argent circule forcement.

Ce constat n’est pas nouveau depuis quelques mois. Du moins pour ceux qui sortent beaucoup les soirs ou on un autre regard, un esprit de recherche. Dans tous les endroits de la ville ce sont des bars, des restaurants, des cafés, des glaciers, des maquis. Une amie me disait que yopougon, un quartier d’Abidjan baptisé la cité de la joie, le slogan c’est maintenant à chacun sa maison et son maquis. Toute la ville est en train de se transformer en des endroits de la joie. Du plaisir. Comme me l’a fait remarquer un de ces artistes étrangers les maquis peuvent exister mais s’ils ne marchaient pas les propriétaires les auraient fermés tout simplement. Or, les places manquent même sans publicité. C’est devenu le refuge de nos concitoyens. Surtout les hommes. On a l’impression qu’ils ne vont pas au travail dans la journée. Pourquoi sont-ils aussi pleins dans les maquis mangeant et buvant ? Toujours accompagnés de jeunes filles qui visiblement ne sont pas leurs épouses ? Comment des adultes, des jeunes et des vieux peuvent-ils se détruire ainsi ? Est-il possible de fermer tous ces lieux qui épuisent financièrement nos concitoyens ? J’ai cessé de me plaindre.

Je crois que c’est ainsi que notre peuple se sent heureux. Sans doute que la vitalité de notre économie tient à ces lieux que tout sage déteste. Dans la vie tout s’apprend par imitation. Un homme qui réussit dans la vie est celui qui a copié un autre. Un bon politicien a été inspiré par un autre qui a marqué son époque ou les siècles. Un journaliste de talent et de référence a pris son envol parce que durant des années il s’est fait l’adepte d’un doyen qui a influencé de millions de lecteurs. En dehors de cette imitation point de succès, de réussite.

Se lancer dans toutes autres activités sans avoir dans l’esprit un modèle achevé d’une réussite c’est courir à l’échec. Voyant de nombreux maquis ou buvettes dans la ville d’autres personnes se lancent dans la même activité sans prendre un opérateur économique comme point de mire. Il serait bon de savoir comment il a débuté, comment il gère ou comment il épargne son peu de bénéfices pour en faire une montagne d’argent. Regarder un homme prospère et se lancer dans la même pratique que lui sans l’avoir étudié c’est courir à l’échec. Ces nombreux maquis ne sont pas forcement rentables car étant le plus souvent bâti selon des méthodes spontanées. Il revient encore à l’Etat de mette de l’ordre dans le domaine de ces lieux de joie ou de décadence des citoyens.

Commencer d’abord par interdire les bruits assourdissants empêchant les riverains de dormir. Un citoyen qui ne dort pas beaucoup n’est pas rentable pour l’entreprise et même pour sa santé. Il faut vite freiner cette prolifération des endroits de bouffe. Il faut que les gens apprennent à rester chez eux pour lire, réfléchir, épargner de l’argent et surtout mener une vie de famille digne. C’est un drame pour le pays que de voir des pères de famille, presque tous les soirs, attablés dans des lieux mentionnés et se plaindre de la cherté de la vie. C’est tout simplement de l’inconscience. Il faut régulièrement que les émissions de radiodiffusion ou de télévision invitent des spécialistes d’épare individuel pour enseigner à nos compatriotes comment ils peuvent se faire des économies sur leurs revenus mensuels. C’est simple, dans tous les cas, en réduisant fortement les dépenses superflues ou diverses. Mais c’est par la répétition qu’on apprend mieux et vite. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.

Par Isaïe Biton Koulibaly