Installée en France, Mariam Sankara se bat toujours pour que la lumière soit faite sur l’assassinat de son mari. Elle raconte à Jeune Afrique « son » 15 octobre 1987.
Ce drame a bouleversé sa vie et celle de ses deux fils. Malgré le temps passé, Mariam Sankara, 64 ans, n’a pas oublié le 15 octobre 1987, jour de l’assassinat de son mari, Thomas. Elle était à Ouagadougou. Elle a quitté le père de ses deux enfants en pensant le retrouver le soir même, mais ne le revit jamais. Installée à Montpellier, dans le sud de la France, depuis 1990, Mariam n’est retournée que deux fois au Burkina, en 2007 et en 2015. Voilà maintenant trente ans qu’elle se bat sans relâche pour connaître la vérité et obtenir justice pour son mari. Elle raconte aujourd’hui « son » 15 octobre.
« Le soir du mercredi 14 octobre, nous étions à la présidence mon mari et moi. Après le dîner, nous avons regardé un documentaire sur Che Guevara à la télévision, puis un autre sur Lénine. Les enfants se sont endormis devant. Je les ai conduits dans leur chambre, puis je suis allée me coucher à mon tour.
J’étais au courant des tensions entre la garde rapprochée de Blaise Compaoré et celle de mon mari
Le lendemain, je me suis réveillée et suis partie au travail [elle était alors chargée d’étude dans le secteur des transports], comme d’habitude. Je suis revenue à midi pour déjeuner. Thomas était en train de travailler à son bureau. J’ai pris mon repas seule, puis je suis allée faire une sieste. Quelque temps après, il est venu me demander de l’aider à mettre au propre son discours du soir. Quand nous avons eu fini, je suis retournée au lit. Lui a déjeuné puis est venu se coucher à mes côtés. Peu avant 15 heures, je suis repartie sur la pointe des pieds pour ne pas le réveiller.
De retour au bureau, j’ai reçu un appel de Thomas qui me rappelait que nous recevions un couple d’amis ce soir-là. Ce fut notre dernière conversation. Vers 16 heures, une amie m’a téléphoné pour me dire qu’elle entendait des coups de feu provenant du Conseil de l’entente.
J’étais au courant des tensions qui existaient entre la garde rapprochée de Blaise Compaoré et celle de mon mari – qui évitait par ailleurs d’aborder le sujet avec moi, car il ne voulait pas m’effrayer. Quand cette amie m’a parlé de ces tirs, je ne me suis pas inquiétée. Je ne pensais pas que c’était lié. Les coups de feu sont des choses qui peuvent arriver dans les camps militaires...
Mariam Sankara : « Je ne voulais pas croire que mon mari avait été tué »