Invité du ‘’Fauteuil Blanc‘’, la tribune mensuelle du Nouveau Réveil, le secrétaire exécutif du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) a commenté l’actualité politique hier, aux II-Plateaux. Maurice Kakou Guikahué, interrogé par la presse, s’est prononcé sur la vie du Pdci, ses rapports avec le Rdr, la santé du chef de l’Etat… Nous vous proposons des extraits de sa communication.
Comment appréciez-vous les attaques entre le Rdr et le Pdci ? Au regard des clashs entre le Pdci et le Rdr, ne donnez-vous pas raison à ceux qui soutiennent que l’alliance Rhdp existe seulement entre Ouattara et Bédié?
La politique ne se fait pas dans les journaux. Une sensibilité peut être proche d’un parti politique. Le parti politique s’exprime par une direction. Vous me donnez l’occasion de dire à ces journaux que si le président Bédié ou moi parle, c’est officiel. Si Adjoumani (le porte-parole, ndlr) parle, c’est officiel. Si une autre personne parle, c’est une opinion. Le Pdci applique la démocratie, nous l’avons démontré à nos congrès.
Nous sommes présents pour donner des leçons de démocratie aux jeunes partis qui sont en Côte d’Ivoire. Nous ne sommes pas offusqués lorsqu’un élu de notre parti s’exprime. C’est cela la démocratie, c’est une question de maturité politique. Nous sommes anciens. Nous avons eu la chance de côtoyer des anciens. Le député est un élu qui est porteur d’une idéologie.
Car un député, en votant les lois, le fait selon les principes de son parti. Mais en Côte d’Ivoire, le député échappe aux partis politiques, il est député de la nation. Ce n’est pas parce qu’un député Pdci parle qu’il faut accuser le parti. Le dernier problème survenu à l’Assemblée nationale est un problème de forme. Tous les projets de loi qui arrivent à l’Assemblée sont signés du président de la République.
C’est normal que le député s’interroge. On peut nous faire une fausse loi. Il est normal que le député cherche à savoir. La saisine qu’a reçue Ouassénan Koné (président du groupe parlementaire Pdci, ndlr) disait : «en attendant la signature des projets de loi, nous soumettons à votre analyse ces textes de loi». Le contenu de cette saisine était différent de celle que Mme Sarra Sako a lue devant les députés. Nous ne sommes par arrivés au Parlement au hasard. Nous avons une expérience parlementaire.
Vous mettez le doigt sur le dysfonctionnement au Rhdp. Je vous le concède. Le Rhdp ne marche pas comme nous l’aurons souhaité. Je suis un adepte du Rhdp. Il a une histoire. Nous lançons des appels à la mobilisation et quand les gens sortent on les tue.
On ne peut pas tourner le dos à ces personnes qui ont versé leur sang. Le Rhdp va exister, se renforcer. Le président Bédié a dit qu’il faut nettoyer le Rhdp, l’entretenir et revenir aux fondamentaux. Le Rhdp, ce n’est pas le président Bédié ou Ouattara. Le Rhdp ce sont des déflagrations sur toute l’étendue du territoire. Le Rhdp marche à la base.
Etes-vous satisfait de la promotion des cadres de votre parti à l’épreuve du pouvoir ? Si le Rhdp devrait devenir un parti, quelle serait la proposition de nom de ce parti ?
Des cadres sont mécontents. Bédié parle de réglages, Mabri aussi, l’Udpci en parle et le Mfa toujours. Il n’y a pas de communication. Je n’ai jamais pensé qu’une fois sorti du Golf, je passerais six mois sans échanger avec Kafana ou Sidiki Konaté. Au Golf, nous avions dix réunions par jour. Nous sommes sortis, cela fait trois ans que je n’ai pas entendu Kafana. Donc les liens n’ont pas été entretenus.
Si au Parlement, on ne parle pas le même langage, c’est la preuve qu’il y a problème. Je dis et j’affirme : nous n’avons pas travaillé comme il le fallait. Des textes de loi d’une telle importance, nationalité, code foncier, etc., touchent à la vie du pays. Il fallait avoir une position Rhdp avant le débat. Le Rhdp ne marche pas bien. Nous avons raté une transition. Il est temps de faire les réglages au sein de cette machine.
S’agissant de la transformation en parti unique du Rhdp, si tu ne t’entends pas aujourd’hui avec les autres, ce sera difficile. Le Rhdp en parti unique est l’aboutissement de nos actions. Nous avons un objectif majeur qui est d’aller ensemble. Apprenons à marcher ensemble d’abord.
L’objectif du Rhdp, dites-vous, est de conquérir le pouvoir et le gérer ensemble. Est-ce à dire que le pouvoir n’est pas cogéré ? Le Pdci veut reconquérir le pouvoir en 2015. Pourtant, on parle de candidature unique au sein du Rhdp. Le Pdci ne s’inscrit-il pas dans cette logique ?
Si j’insiste sur le mot gérer ensemble, c’est parce qu’il n’y a pas de cheval, ni de cavalier. Retenez que le Pdci n’est pas parti aider, car celui qui aide quelqu’un, c’est différent de quelqu’un qui fait pour lui. Le Pdci n’a pas aidé le Président Ouattara. Le Pdci a conquis le pouvoir avec comme champion Ouattara. Que le Rdr accepte et oublie qu’il a gagné le pouvoir.
Le Président Ouattara, au second tour, n’était pas le candidat du Rdr, mais du Rhdp. C’est le Rhdp qui a gagné le pouvoir. Ce n’est pas le Rdr qui a remporté les élections. C’est nous tous. C’est vrai que les doigts de la main n’ont pas la même taille, mais chaque doigt est important.
Depuis notre arrivée au secrétariat du Pdci, nous donnons une leçon. A l’élection des conseils régionaux, pour le président des régions, Ahoussou a été élu avec le soutien du Rdr : partage équitable des postes. Election du président de l’Uvicoci (Union des villes et communes de Côte d’Ivoire, ndlr), Kafana Koné a été élu et nous avons partagé les postes de façon adéquate. Nous avons donné un poste à l’Udpci, indépendant. Et c’est ce qui sera fait maintenant.
Que savez-vous de la santé du chef de l’Etat ? Qu’en est-il de la proposition du Pdci de créer un poste de vice-président? Le Pdci aura-t-il un candidat en 2015 ? Votre parti préparerait la transition…
Je suis médecin, mais je ne suis pas son médecin, donc je ne parlerai pas en tant que médecin, mais de secrétaire exécutif. D’abord, le président de la République – je ne dis pas que c’est un droit – il peut tomber malade : il est un être humain. Tous quand vous tombez malade, il n’y a pas de scandale. Lui, il est le président des Ivoiriens, il est tout à fait normal qu’on parle de son état de santé.
Vous dites que je suis cardiologue ; ce n’est pas un problème de ce côté-là. On nous a dit que c’est une sciatique. Il a été opéré, il se porte bien. Ce que nous apprenons, il va revenir très bientôt en Côte d’Ivoire. Vous parlez de transition, il n’en est rien du tout. On n’en discute pas… Et puis, la Constitution est tout à fait claire : quand le chef de l’Etat est absent de Côte d’Ivoire, le Premier ministre assure l’intérim.
C’est un mécanisme: il n’y a pas de vacance. On n’a pas mis dans la Constitution combien de jours le président de la République peut passer à l’extérieur. Il est tombé malade, il est soigné, il va revenir en Côte d’Ivoire: donc il ne faut pas supputer. Il faut prier pour que sa santé s’améliore. Le Pdci souhaite qu’il soit rétabli et nous sommes très heureux que son épouse soit revenue en Côte d’Ivoire ; c’est une très bonne chose. Elle est venue à Abidjan, elle va repartir. Nous n’en faisons pas un drame (…).
Hier, (mardi, ndlr) nous sommes partis à une réunion, à la Primature. Il n’y a avait pas de Forces nouvelles. Tous ceux qui représentaient les Forces nouvelles sont entrés dans des partis politiques. Pour le Pdci-Rda, on va discuter, mais la Cei doit être recomposée parce que les Forces nouvelles n’existent plus. Est-ce que ce sera une Cei de partis politiques, une Cei de société civile, une Cei mixte… Point d’interrogation. On n’a pas encore dit quel sera le type. (…)
Pourquoi le Pdci veut-il la création d’un poste de vice-président?
Le Pdci a fait une analyse politique au cours de son congrès. C’est une résolution du congrès : la forme de l’Etat. Autant un leader politique demande qu’on fasse une démocratie parlementaire, autant le Pdci a trouvé qu’il y avait une forte sacralisation du poste de président de la République.
Est-ce qu’il ne fallait pas copier le modèle ghanéen où il y a un vice-président ? On a réfléchi et trouvé important qu’il y ait un poste de vice-président pour qu’en cas de problème, la transition se passe bien. L’une des grandes démocraties dans le monde, le Pdci, a un poste de vice-président.
Le Pdci n’a pas dit qu’il faut un poste de vice-président pour l’occuper. Pourquoi le Pdci ne serait pas Président et un autre vice-président ? Quelqu’un peut être vice-président et nous, Président. Nous, on veut être Président. Pourquoi voulez-vous qu’on soit vice-président ? Le Pdci pense que s’il y a un vice-président, comme aux Etats-Unis, ce sera une bonne chose. (…)
Propos recueillis par Bidi Ignace
Coll. Eric Diomandé
Maurice Kakou Guikahué, secrétaire exécutif du Pdci : «Il n’y a pas de vacance du pouvoir» - Photo à titre d'illustration