Quelque 6,3 millions d'électeurs ivoiriens sont convoqués aux urnes dimanche, pour élire leur président et tourner la page des violences de 2010. Reportage dans les quartiers populaires d'Abidjan.
De lourds nuages noirs planent au-dessus d'Abobo, commune populaire d'Abidjan, en Côte d'Ivoire. En ce dimanche 25 octobre, où quelque 6,3 millions d'Ivoiriens sont appelés aux urnes pour désigner leur président, des dizaines de personnes attendent devant l'école primaire Saint-Séraphin, qui fait aujourd'hui office de centre de vote. Il est 8 heures et les bureaux sont toujours fermés aux électeurs.
Initialement prévu à 7 heures, l'accueil des votants a pris du retard ici à Abobo, quartier qui penche traditionnellement pour le parti du président sortant Alassane Ouattara. Les assesseurs de la Commission électorale indépendante (CEI) sont pourtant bien tous présents. Les urnes, les isoloirs et les bulletins de vote aussi. "En fait, on attend les tablettes biométriques, affirme un secrétaire de bureau. Mais ils sont en train de les convoyer."
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Afin d'éviter que des fraudes viennent entacher les résultats de ce premier tour de la présidentielle, la CEI a mis en place un système de contrôle biométrique dans chaque bureau de vote. Les appareils numériques permettent de scanner la carte d'électeur et l'empreinte digitale de toute personne se présentant aux urnes.
"Chez Obama, vous croyez qu'ils ont des problèmes avec leurs tablettes ?"
À 8h30, la pluie tombe sur l'école Saint-Séraphin. Et les fameuses tablettes ne sont toujours pas arrivées à destination. Dehors, les esprits s'échauffent un peu. "Même s'il pleut, nous, on reste ici !", s'exclame un électeur. "Chez Obama, vous croyez qu'ils ont des problèmes avec leurs tablettes ?", vitupère une autre. "Je suis venue dès 6 heures et je ne pourrai pas voter...", se désole Fanta, qui doit prendre son travail à 9 heures.
À Abidjan, de nombreux bureaux ont ouvert avec près de deux heures de retard. À Yopougon, quelques commissaires de la CEI ont finalement renoncé à attendre l'arrivée des tablettes pour accueillir les premiers électeurs. Dans cette commune réputée favorable au Front populaire ivoirien (FPI), le parti de l'ancien président Laurent Gbagbo aujourd'hui représenté par Pascal Affi N'Guessan, ce n'est pas la grande foule devant les centres de vote.
"Les chrétiens sont actuellement à l'église. Ils vont venir après la messe", assure Lazare, qui se fait un devoir de voter. "On dit qu'il n'y a pas suspens mais cette élection est importante pour la paix, affirme-t-il. Je suis un homme d'affaires et c'est avec la paix que je mène mes activités !"
La grande inconnue du taux de participation
Pour cette présidentielle, la première depuis la crise post-électorale de 2010-2011 qui s'était soldée par la mort de plus de 3 000 personnes, la mobilisation des électeurs constitue l'un des enjeux majeurs du scrutin. Selon les observateurs de la vie politique ivoirienne, le taux de participation devrait être en-deçà des 80 % atteints il y a cinq ans.
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Dans le camp du chef de l'État sortant, on parie depuis le début de la campagne sur une victoire dès le premier tour. Un objectif qu'il considère d'autant plus à sa portée que trois figures de l'opposition qui s'étaient portés candidats (l’ex-ministre des Affaires étrangères Essy Amara, l’ex-président de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly et l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny), se sont retirés de la course qu'ils qualifient de "mascarade électorale". Seul véritable challenger d'Alassane Ouattara parmi ses six adversaires, Pascal Affi N'Guessan brigue, quant à lui, la présidence sous les couleurs d'un FPI divisé, les partisans de Laurent Gbagbo, actuellement détenu à La Haye, ayant décidé de boycotter le scrutin.
Selon la Constitution, la CEI a cinq jours pour annoncer les résultats. Mais son président, Youssouf Bakayoko, s'est déjà engagé à les rendre publics "dans les meilleurs délais"....
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