La Cour d'assises s'est réunie hier lundi 27 janvier 2014, au Tribunal du Plateau. Au menu des débats, le procès du général Boblaé Jean-François, de l'ex-directeur de la surveillance du territoire (DST), le Commissaire Négblé César et d'autres commissaires de police dont Monnet Denis, commissaire du palais sous Laurent Gbagbo.
L'audience qui a ouvert le procès a duré toute la matinée d'hier, sous la présidence du magistrat hors hiérarchie Diallo Mamadou. Il était entouré de généraux dont Fiacre Kili. Après l'instruction du dossier, le juge a rejeté tous les chefs d'accusation, « une pléthore de délits », qui étaient retenus contre les prévenus à savoir ''atteinte à la sûreté de l'État, recel de cadavre, violation de consignes, fourniture d'armes à des rebelles, etc''.
Seul la charge ''violation de consignes'' a été retenue avant que l'audience ne soit suspendue, puis renvoyée au lundi 3 février 2014 par le juge Diallo Mamadou sur proposition du substitut du Procureur militaire, le capitaine Losséni Dosso.
La raison de ce renvoi, c'est que le juge Diallo Mamadou a décidé d'entendre à la barre comme témoins, le colonel-major Konan Boniface, l'ancien patron des Fusiliers marins commandos (FUMACO), une unité spéciale de la marine nationale restée fidèle à Laurent Gbagbo, et le commissaire Sami Bi, ex-directeur général adjoint de la police nationale.
Konan Boniface, on le sait, avait pris une part active dans la bataille pendant la crise post-électorale, aux côtés de Laurent Gbagbo. Son témoignage est attendu dans ce procès contre ces militaires restés fidèles à l'ancien président ivoirien.
Il faut, par ailleurs souligner que le contrôleur général de police, Boblaé Bossébo Jean-François, les commissaires Gnépa Philipe, Yoro Claude, Négblé César, Tiagnéré Jean-Louis, Robé Gogo Joachim, les capitaines majors, Guédé Zagahi, Kobli Dénis, Monnet Dénis et le Sergent Déhi Tié Hypollite, comparaissent désormais pour violation de consignes devant la Cour d'assise.
Hier, l'ancien patron de la DST, Négblé César, est apparu très affaibli. Il était vêtu d'un jogging de couleur grise, et avait une serviette rouge. Il avait du mal à se déplacer et se faisait aider de deux personnes. Selon son avocat, le commissaire Négblé César souffre d'un ulcère chronique. Notons que ces gradés de la police nationale sont poursuivis pour des actes qu'ils auraient posés pendant la crise post-électorale.
Les avocats de la défense conduits par Me Raoul Gohi Bi, ont rejeté cette décision, affirmant que leurs clients ont déjà passé 3 ans en prison. Pour eux, la présence des « témoins capitaux » Konan Boniface et Sami Bi n'est pas nécessaire pour la tenue du procès. Mais, pour une question de clarté, le juge a souhaité les entendre.
Même si, selon le Procureur militaire, « tous les moyens » ont été engagés pour les faire comparaître, en vain. La justice reproche aux prévenus d'avoir violé une consigne générale donnée par Alassane Ouattara le 4 décembre 2010, depuis sa position de l'hôtel du Golf, ordonnant aux forces de défense et de sécurité (FDS) de se mettre à sa disposition.
Ces hommes, qui occupaient des postes stratégiques dans le dispositif sécuritaire sous Laurent Gbagbo, n'avaient pas obéi à cette consigne. Ainsi, le 16 décembre 2010, une marche lancée par Guillaume Soro pour installer un nouveau directeur général de la télévision nationale avait dégénéré. La période prise en compte dans l'affaire part du 4 décembre 2010 au 11 mars 2011.
Revenant sur les consignes qui auraient été données, l'avocat de la Défense s'est interrogé : « il s'agit de consignes données par qui et à quel moment ? ». « Nous attendons le Commissaire du gouvernement qui a la lourde charge d'apporter la preuve de cette accusation. Quant à nous, nous attendons de pouvoir répliquer », a déclaré à la presse Me Gohi Bi à l'issue de l'audience.
En effet, selon lui, même s'il devait y avoir condamnation, le code de procédure militaire en son article 92 stipule que dans le cas de figure (violation de consignes), les prévenus encourent une peine d'emprisonnement allant de 6 mois à 2 ans. Mais, pour Me Gohi Bi Raoul, « s'il y a condamnation, ils auront purgé déjà leur peine, mais l’alinéa 2 de l'article indique que la peine peut monter jusqu'à 5 ans si on est en temps de guerre, en état d'urgence ou rébellion armée ».
Reste au Commissaire du gouvernement de prouver effectivement que la Côte d'Ivoire était en état de guerre. Pour sa part, l'état de guerre ne se constatant pas, Ange Kessi et son bureau devront apporter la preuve que la guerre avait été déclarée pendant la crise postélectorale.
Hervé KPODION
Procès de la crise postélectorale : le colonel-major Konan Boniface réclamé à la barre - Photo à titre d'illustration