RGPH 2014: Le boycott du FPI s'effrite à Agboville

  • 14/06/2014
  • Source : AIP
Agboville - Le Récensement général de la population et de l'habitat (RGPH 2014) revit dans le pays Abbey. En effet, alors qu’une dizaine de jours après le lancement officiel des opérations, le 31 mars, et suite au mot d'ordre de boycott qui s'en est suivi, venant du Front populaire ivoirien (FPI, parti dans l'opposition créé par l'ex-président Laurent Gbagbo), le préfet de région de l'Agnéby-Tiassa, préfet du département d'Agboville, Bako Privat, annonçait à la stupeur générale, que « seules 17 % de la population du département d'Agboville, est recensés ».

Aujourd'hui, à quelques heures de la fin de l'opération, l'on parle d'un taux de couverture départemental, de l'ordre de 92% de la population estimée (au 07 juin).

1-    Raisons qui ont concouru au faible taux
 
Une des raisons majeures est, bien sûr, le suivi par la population d'Agboville, du mot d'ordre de boycott lancé par le FPI. A ceci, il faut ajouter l'inorganisation du RGPH dans la localité, où les agents recenseurs se plaignent au quotidien, du manque de moyens de locomotion (trois vélos pour onze chefs d'équipe) et son corollaire de l'éloignement des sites d'habitation, notamment les campements, difficultés de connexion, agents laissés à l'abandon dans les villages, ou encore réelles difficultés de couvrir objectivement le recensement en l'espace d'un mois.
 
En ville, les jeunes agents recenseurs, confrontés à la chaleur torride (avril et courant mai), n'ont pas hésité à s'engouffrer dans la brèche du boycott, pour saboter involontairement le travail. Ils sont nombreux à raconter que les ménages refusent de les recevoir, ce qui est sûrement vrai. Mais, ils oublient de dire qu'ils décident par eux-mêmes, d'occulter des cours entières, au prétexte, que ces dernières sont de populations Abbey, indexées comme adeptes du président Laurent Gbagbo détenu à La Haye ou encore reconnues comme partisans de la ligne dure du Fpi, donc, successibles de refuser le recensement.
 
 
Par ailleurs, les agents recenseurs font traîner en longueur le processus, vu qu'ils n'avoir pas de lisibilité quant à leur fond. « Nous avions voulu entreprendre des activités génératrices de revenu, malheureusement, on nous paie en monnaie de singe et pis, nous avons des échos non-favorables, concernant les différents reliquats », a expliqué Charles Degnan, agent recenseur. Chacun des 365 agents recenseurs que compte la région, a affirmé avoir perçu 20 000 FCFA puis 30 000 FCFA, soit un total de 50.000 sur 100 000 FCFA promis pour la première étape, avant prolongation du contrat, après fin avril.
 
Enfin, nombreux de ceux qui étaient dans les villages, ont été redéployés en ville pour la plupart. Ils ont pu tant bien que mal réaliser le travail dans les villages, mais, à leur corps défendant, on du abandonner les nombreux campements, faute de moyen de locomotion.

2-    L'opposition à l'opération n'est plus systématique
 
« Je veux bien me faire recenser, mais, laissez vos questions du genre - y a-t-il une télévision dans votre maison ? ou encore- y a-t-il des carreaux dans la douche ? » , a insisté Dame Monique Nguessan, au quartier Sanbrégnan, si l'on en croit Stéphan Kouamé, un autre agent recenseur, qui rapporte les faits.
 
Nous avons pu effectivement nous rendre compte, que depuis quelques semaines, où pouvoir et oppositions tergiversent, plusieurs ménages alors hostiles au projet, ont commencé à adhérer au projet, non sans exiger que certains aspects du questionnaire ne soient pas pris en compte. « Sous Bédié, on ne nous demandait pas tous ces détails. Pourquoi aujourd'hui, c'est le cas », s'interroge Angodji Noël, du quartier Château, qui s'est toujours dit prêt à collaborer, mais pas sur tous les aspects du questionnaire.

     3- Un nouveau mode opératoire
 
Dans le quartier Sogefiha, la situation de Marcel Angoua, agent recenseur permet de mieux cerner la collaboration nouvelle qui s'est instaurée avec les populations au départ hostiles au projet. Sur les 1309 ménages et logements répertoriés, 997 ont pu être recensés au 07 juin . Si ce chiffre est flatteur, il faut noter que du début de l'opération se situant au 03 avril, seuls 261 personnes avaient accepté de se faire recenser jusqu'au 15 mai de la même année.
 
Ainsi, l'on note 716 individus recensés en trois semaines, soit du 16 mai au 07 juin, correspondant sensiblement à la période de dégel entre le pouvoir et l'opposition, notamment le Front Populaire Ivoirien. Tous ont répondu favorablement à la demande de participer au recensement, dès lors que le questionnaire a été limité. « Ok, si vous procédez comme au temps d'Houphouët, où seuls, le nom, prénom, âge, date et lieu de naissance, profession, etc étaient mentionnés, nous disaient-ils », rapporte l'agent recenseur.
 
Mieux, l'agent a pu recenser une dizaine de personnes qui étaient farouchement hostiles au RGPH, au prétexte que Laurent Gbagbo est à La Haye et Affi n'a pas encore donné le feu vert. Ces personnes ont finalement accepté de jouer le jeu, en répondant à l'entièreté du questionnaire. Plusieurs agents rencontrés sur le terrain ont aussi fait le même constat d'une participation de plus en plus importante de personnes, antérieurement favorables au boycott.
 
Peut-on légitimement dire, qu'à ce jour, le boycott s'effrite ? Cette question mérite tout son sens, vu le bond spectaculaire effectué par les agents recenseurs, avec la mise en application d'un nouveau mode opératoire exigé par un grand nombre de citoyen.

4-    Le préfet annonce un taux de 92%
 
Dans la ville d'Agboville, de nombreuses concessions ont commencé par s'y mettre, grâce aussi au renforcement de l'effectif des agents recenseurs revenus des villages, et de l'appui de l'autorité préfectoral. Le secrétaire général de préfecture, était lui-même aux côtés de ses agents, pour poursuivre la sensibilisation.
 
« Nous avons pratiquement bouclé et à ce jour (07 juin), nous sommes à un taux de couverture de 92% », soutient le préfet Bako Priva. Même si la poussée est effective, les agents demeurent sceptiques quant au chiffre avancé. « Peut-être, l'administration a-t-elle une méthode particulière de procéder au comptage ? », s'interroge un chef d'équipe, pour qui le chiffre de 50 à 60%, serait raisonnable.

 
dd/cmas