Tchad : Les malades du VIH découragés par le manque de prise en charge

  • 07/11/2017
  • Source : APA
Les personnes vivant avec le VIH/Sida au Tchad sont dans le désarroi ces dernières semaines, les hôpitaux du pays en charge d’assister les malades ne sont plus en mesure de les prendre en charge comme avant, a-t-on constaté.

«On nous donne les ARV (anti rétroviraux) avec beaucoup de retard. Et parfois, on trouve les médicaments après le rendez qu’on nous donne. C’est difficile pour nous»,  se plaint Albertine, une patiente sous traitement à l’hôpital de l’Union de Chagoua, au milieu d’une foule de patients devant le bureau médecin traitant.

Certains patients très calmes, ne pipent mot, tandis que d’autres échangent à voix basse, affichant l’air soucieux ou pensif.

Après plus de quarante minutes d’attente, une infirmière de garde, sort, se tenant devant le portail de la salle de soins, annonce aux patients que «le médecin qui devrait s’occuper d’eux, n’est pas disponible».

Presqu’en cœur, les patients fulminent : «c’est souvent comme ça ces derniers temps dans vos services». L’un après l’autre, ils se dispersent, désespérés.

L’Etat tchadien prend en charge gratuitement la distribution des ARV. Mais, depuis que la crise est passée par là, les patients observent un changement. Ils dénoncent un manque des comprimés pour les maladies opportunistes qu’on leur donne pour accompagner les ARV.

Au quartier Chagoua, dans la commune du 6è arrondissement, l’hôpital géré par les catholiques prend en charge 2352 malades du Vih/sida.

Une infirmière confie à APA que de nombreux malades ont abandonné leur traitement depuis janvier et d’autres ne respectent pas les rendez-vous pour chercher leurs médicaments, expliquant que cette situation est due parfois au retard et au manque des produits qui décourage les intéressés.

Au district sanitaire de N’Djaména Centre appelé hôpital Sultan Kasser, au total 1105 malades suivent leur traitement mais d’après le surveillant de ce centre hospitalier, M. Balanga Delguesse, par ailleurs responsable de la prise en charge pour les maladies chroniques, de nombreuses femmes ont abandonné leur traitement.

Cet abandon selon M. Balanga, fait baisser le taux de CD4 jusqu’à 108 ,106 chez certaines femmes. A ce stade, dit-il, le patient a de l’anémie donc difficile de remonter son taux de CD4.

Les lymphocytes T4 ou CD4 sont les cellules immunitaires chargées d'organiser la réaction à une infection. Ce sont eux qui sont attaqués et détruits par le VIH.

M. Balanga indique que le taux de CD4 doit rester à 500 et à ce niveau, précise-t-il, le malade se porte bien parce que le rendez-vous pour la prise de ses médicaments est respecté.

«Les femmes ont honte de prendre leurs médicaments. Elles cachent les ARV et autres médicaments qu’on leur donne dans des plastiques et refusent d’en prendre d’où la baisse du CD4 » déplore M. Balanga Delguesse.

Mais, certains patients regrettent que, dans certains hôpitaux, c’est l’appareil pour le CD4 qui est en panne. Dans ce cas, les malades sont transférés à l’hôpital général de référence nationale (HGRN), pourtant, dans cet hôpital, les médecins refusent de prendre en charge les malades transférés.

En plus des difficultés liées au CD4, parfois les malades évoquent de rupture de certaines molécules ARV dans les hôpitaux.

Le chargé de la Planification et de l’Information stratégique au Conseil national de lutte contre le sida (CNLS), M. Hayangou Danguigué Sanatcho, déclare que les ARV sont disponibles mais étant donné qu’ils sont gratuits, les hôpitaux ne viennent pas les chercher et préfèrent des médicaments qu’elles peuvent vendre.

M. Sanatcho se réjouit que, certains hôpitaux utilisent les appareils à charge virale à la place des CD4 pour détecter le taux de virus chez le patient.

Seulement, reconnait M. Sanatcho, la crise économique a eu des répercussions sur les activités du Conseil national de lutte contre le sida.

Le gouvernement tchadien est appuyé dans la prise en charge des malades du VIH/sida par le Fonds mondial à hauteur de 30% sur le coût global du traitement. Mais, M. Sanatcho, constate que, les activités sont depuis quelques temps trop timides.

Le taux de prévalence du VIH/sida au Tchad est de 1,6% en 2016 selon les données du Conseil national de lutte contre le sida (CNLS) et le Programme sectoriel de lutte contre le sida (PSLS).

Par rapport aux précédentes années, il y a une légère baisse du taux de prévalence de la maladie qui était de 3,3%.

Au total 110 000 personnes sont porteuses de la maladie au Tchad dont 47 844 sont sous traitement ARV.

Le nombre global des femmes infectées est de 30 880 et les enfants de moins de 15 ans sont au nombre de 1542 qui sont sous ARV sur l’ensemble du territoire national.

AHD/of/APA