Personne ne peut s’en convaincre, vu le caractère tellement banal de ce fait qui, aujourd’hui, sème le trouble et la confusion dans les esprits des populations de la sous-préfecture de Péhé. C’est une localité située à une quinzaine de kilomètres de Toulépleu, chef-lieu de département.
Mais, la résonance de cette affaire est telle que tout le département de Toulépleu est en émoi et pris de psychose. Samedi 28 mars 2020, il est 9 h lorsque Péhé Noudé Gabriel, 62 ans, fonctionnaire à la retraite, asthmatique chronique, se présente au dispensaire de Péhé, muni de son carnet, pour un traitement d’une toux grasse. Monsieur Salé, l’infirmier-major, qui le reçoit, dans la hantise de la maladie à Coronavirus, sans pratique de prise température et en dehors de tout autre test, conclut, à la va vite, que le patient Péhé Noudé Gabriel « est porteur du virus Codiv-19 ». Panique générale dans le village. L’homme est aussitôt embarqué à bord de l’ambulance du dispensaire vers l’hôpital général de Toulépleu. Du samedi 28 mars au vendredi 3 avril 2020, soit pendant 7 jours, le suspect est placé en isolement total « sans soins particuliers », selon D. Laurent, son neveu que nous avons joint, dimanche 5 avril 2020, en milieu de journée, à Toulépleu. Au bout d’une semaine d’isolement et vu que le patient ne présentait ou ne développait aucun symptôme ni tout autre signe en lien avec le Coronavirus, il est déclaré négatif par le médecin traitant. "Ils m’ont dit qu’ils allaient me ramener au village. Et qu’ils viendraient prendre ma température les matins et les soirs » nous a confié le suspect. C’est ainsi que le vendredi 3 avril 2020, aux alentours de 17 h, à bord de l’ambulance de l’hôpital général de Toulépleu, il regagne son village, où il est accueilli, par les siens, en fanfare. Mais, coup de théâtre ! Le samedi 4 avril 2020, soit le lendemain après avoir été déclaré négatif et renvoyé dans son village, un revirement spectaculaire de situation se produit. Des infirmiers de Toulépleu, à bord de l’ambulance, débarquent chez le patient et lui intime l’ordre d’embarquer avec eux « pour des contrôles complémentaires ». Le village, sous le choc, se soulève et oppose un refus catégorique. « Ils m’ont forcé à embarquer dans l’ambulance, ce que j’ai refusé » explique encore le suspect Noudé. Les agents de santé ont dû recourir à l’intervention du sous-préfet de la ville, pour faire entendre raison aux populations très en colère et au suspect. Péhé Noudé Gabriel a été emmené, tard la nuit, contre son gré à Toulépleu. Cette fois-ci, la destination change. il a été conduit au «
centre intégré » de traitement d’Ebola, construit à l’entrée de la ville, sur la colline dite « Toulépleu-Bonjour », route de Guiellé, où il a été replacé en isolement. Avec pour seul traitement « de la nourriture », nous a confié un membre du staff médical. « Il sera soit libéré ou conduit à Abidjan » sur instructions des autorités sanitaires gouvernementales, nous a-t-il expliqué. « Je ne sais pas ce que ces gens-là me veulent. Je n’en peut plus. C’est une vraie torture que de je vis » s’indigne Péhé Noudé. Les médecins de l’hopital général de Toulépleu, que nous avons interrogé se refusent à tout commentaire sur ce cas, pour le moins bizarre. Simple crise d’asthme ou véritable cas de coronavirus ? Pour l’heure, la confusion est totale à Toulépleu sur ce cas...
Armand B. DEPEYLA
Toulépleu / Lutte contre le Coronavirus: Confusion totale autour d’un cas suspect - Photo à titre d'illustration