Sept ans après la fin de la crise postélectorale, des victimes attendent toujours l'ouverture des procédures. Les responsabilités sont partagées, de la sphère politique à l'institution judiciaire, critiquée pour sa lenteur.
Tribune. Mi-avril 2018, Yamoussoukro. Le corps préfectoral au grand complet s’adresse au président ivoirien, Alassane Ouattara. « Les populations attendent que tous les acteurs politiques acceptent votre main tendue et s’inscrivent résolument dans le processus de réconciliation, qui ne saurait faire l’économie de la justice et de la réparation des dommages subis, déclare Georges Gombagui Gueu [préfet de la région de la Bagoué] au nom de ses pairs. Toutefois, la réconciliation nationale pourrait être consolidée davantage par le pardon que vous pourriez éventuellement, dans la forme juridique appropriée, accorder à certains de vos compatriotes. »
Cette sortie, enrobée dans un discours diplomatique, traduit une réalité implacable : le processus de réconciliation nationale, engagé après la crise postélectorale de 2010-2011, est en panne. Il avait pourtant démarré en grande pompe, en avril 2011, au lendemain de la chute de Laurent Gbagbo. Le président Alassane Ouattara, qui en faisait une « priorité », avait lancé l’ambitieuse Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR), confiée à l’ex-Premier ministre Charles Konan Banny. Mais, en décembre 2014, ses travaux avaient été interrompus.
Le gouvernement comme juge
Sur ses cendres est née la Commission nationale pour la réconciliation et l’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire (Conariv), présidée par Mgr Paul Siméon Ahouana.
"Le gouvernement, qui avait opté au début du processus pour la neutralité, a fini par devenir juge
Celle-ci n’a pas connu un meilleur sort : la suspension de l’une de ses missions essentielles, l’indemnisation des victimes des crises armées et politiques, a dégradé la lisibilité de la politique de réconciliation dans son ensemble. Cette tâche ayant finalement été confiée, en 2017, au ministre de la Femme, de la Protection de l’Enfant et de la Solidarité...
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