Des sources policières, les services de renseignements ivoiriens suivent attentivement, depuis bientôt un mois, un sérieux projet d’atteinte à la sécurité physique de certains cadres militants du Front populaire ivoirien (Fpi).
Courant juin 2015, dans le cadre de leurs activités quotidiennes de veille pour la sécurité nationale de l’État de Côte d’Ivoire, un service de renseignement de la police nationale a reçu une information relative à la tenue de réunions nocturnes régulières au domicile d’un opposant au régime Ouattara.
Après le recoupement de cette information, le service de renseignement a conclu, ont révélé nos informateurs, qu’il s’agissait, en réalité, de réunions de cadres ivoiriens, tous militants dans des partis d’opposition.
Et comme il est de coutume dans tous les services d’intelligence, une équipe de veille a été constituée pour suivre de loin les activités du groupuscule d’opposants considéré comme «une menace potentielle».
Depuis le début du dépôt des candidatures à l’élection du président de la République entre le 3 et le 25 août 2015, l’équipe de veille du service de renseignements de la police nationale a constaté une augmentation de la fréquence des réunions.
Avec les derniers appels de certains cadres de l’opposition ivoirienne au boycott de tout le processus électoral, les agents de renseignements (officiers traitants) s’expliquaient difficilement le regain d’activités du groupuscule dans la période de dépôt des candidatures pour la présidentielle d’octobre 2015.
Le service a aussi noté que, dans la même période, certains parmi les cadres de l’opposition qui participent aux réunions nocturnes rapprochées multipliaient des déclarations publiques ponctuées de menaces verbales, appelant le gouvernement à des négociations en vue de l’instauration d’une transition politique.
Autant de faits qui ont intrigué les agents qui, constatent nos sources, ont sollicité et obtenu la «déclassification» du groupuscule d’opposants de «menace potentielle» en «menace réelle».
Cela a permis aux agents d’obtenir de leur hiérarchie des moyens techniques et logistiques appropriés pour suivre avec l’attention requise en pareilles situations les activités du groupuscule de cadres de l’opposition ivoirienne.
C’est dans le cadre dudit suivi que les agents de renseignements ont noté, explique un informateur, que le groupuscule a évoqué, au cours de réunions tenues fin août 2015, de «tout mettre en œuvre pour obtenir du gouvernement l’instauration d’une transition politique».
Dans les scénarii pour «arracher la transition politique», il a été évoqué des agressions physiques, y compris des assassinats contre certains cadres du Front populaire ivoirien (fpi) se réclamant de la tendance de l’ex-Premier ministre Pascal Affi N’Guessan.
Cela engendrerait une situation trouble qui poussera l’ancien Premier ministre à rompre le dialogue avec le gouvernement qui sera forcément accusé par l’opposition d’avoir fomenté des assassinats politiques.
La conséquence immédiate attendue serait que les principaux candidats à l’élection du président de la République issus de l’opposition renoncent à leur candidature du fait de l’insécurité et du climat de terreur instauré par le pouvoir Ouattara à la veille du scrutin.
Une liste de hauts cadres du Fpi très proches de Pascal Affi N’Guessan et membres de sa direction nationale de campagne a été dressée, toujours selon nos sources, relativement à ce malheureux projet. Cette liste a été élargie, dans une seconde hypothèse, à certains représentants de l’opposition significative au sein de la commission en charge des élections. Notamment ceux qui y siègent contre l’avis de certains cadres de l’opposition.
Dans leur stratégie, les concepteurs dudit projet auraient fait savoir que la disparition de représentants de l’opposition significative au sein de la Commission électorale indépendante (Cei) créerait, à coup sûr, une crise dans la mesure où ils ne seront pas systématiquement remplacés par les partis politiques de l’opposition qui, dans l’ensemble, contestent déjà leur présence au sein de cette institution qu’ils estiment inféodée au pouvoir exécutif. Dans l’hypothèse de «la disparition de ses membres», la Cei serait «définitivement décrédibilisée» par l’absence de représentants de l’opposition significative.
Le gouvernement serait contraint à ouvrir des négociations politiques qui devront in fine aboutir au report de l’élection présidentielle et surtout à l’instauration d’une transition politique, vu que le mandat de l’actuel chef d’Etat sera achevé au plan constitutionnel.
Parlant des raisons du choix des cibles potentielles, une source a expliqué que, à en croire les «rapports d’écoutes», il a été indiqué que la plupart des personnalités listées ne font pas l’objet de sécurité rapprochée ni de garde à domicile de la part des services de police ou de gendarmerie.
En outre, elles constituent des «cibles faciles», selon les concepteurs du funeste projet lorsqu’elles se trouvent dans leur département d’origine où elles se rendent régulièrement pour les activités politiques. Notamment la campagne de leur candidat Pascal Affi N’Guessan.
Interrogées, enfin, sur les moyens mis en œuvre pour anticiper cette menace d’ordre sécuritaire susceptible de troubler l’équilibre des institutions de la République de Côte d’Ivoire, nos sources ont indiqué que les grands moyens ont été dégagés par les services d’intelligence pour suivre les concepteurs de ce funeste projet qui, selon nos informateurs, «seront démasqués et conduits au parquet».
La source a conclu qu’«avec les preuves sonores et visuelles que nous avons,
il leur sera difficile, avec leurs avocats-conseils, d’évoquer un motif politique au moment de leur arrestation».
KOUKOUGNON Zabril
Photo d'archives à titre d'illustration / Investiture d'Affi N'guessan