HRW demande le rétablissement de l'équilibre de la justice ivoirienne

  • 23/03/2016
  • Source : Lebabi.net
L'Ong Human Rights Watch (HRW) a appellé, mardi, les autorités ivoiriennes à tenir des procès équitables pour juger les crimes commis lors de la crise post-électorale de 2010-2011.

 Dans un rapport intitulé « La justice rétablit l’équilibre : Vers une lutte crédible contre l’impunité pour les crimes graves commis en Côte d’Ivoire », HRW s'insurge sur le fait que la Côte d’Ivoire n’a pas encore rendu la justice pour les victimes de crimes graves commis par les deux camps lors de la crise postélectorale qui a ravagé le pays en 2010-2011.
 
"Le Président Alassane Ouattara et son nouveau ministre de la Justice, Sansan Kambile, devraient renforcer le système judiciaire du pays afin qu’il puisse rendre une justice attendue depuis trop longtemps" invite l'organisation.
 
"Les victimes des crimes haineux perpétrés durant la crise postélectorale souffrent en silence depuis cinq longues années », a déclaré Param-Preet Singh, juriste senior auprès du programme Justice internationale à Human Rights Watch, notant que les procès des principaux criminels des deux camps adresseraient un message clair que les auteurs de graves violations des droits humains ne pourront échapper à la justice.
 
En juin 2011, le Président Ouattara a créé un groupe de travail de juges et de procureurs – La Cellule spéciale d’enquête et d’instruction – visant à promouvoir les efforts pour traduire en justice les auteurs des crimes liés à la violence postélectorale. 
 
Cette mesure offrait l’espoir qu’enfin le gouvernement était décidé à lutter contre la culture d’impunité profondément enracinée en Côte d’Ivoire.
 
"Cependant, après des années d’un soutien insuffisant de la part du gouvernement, la Cellule spéciale a enfin reçu des ressources supplémentaires fin 2014, et en 2015 elle a mis en accusation plus de 20 personnes – y compris des membres de haut niveau des forces des deux camps – pour leur rôle dans les violations des droits humains commises pendant la crise postélectorale" précise HRW.
 
 Même si les progrès accomplis dans les enquêtes sont encourageants, la justice ne sera rendue aux victimes que si les criminels sont jugés lors de procès indépendants, impartiaux et équitables, selon HRW
 
Liberté Provisoire
 
HRW préconise aussi "la liberté provisoire à tous les accusés se trouvant en détention préventive qui ne constituent pas une menace pour les témoins et qui ne risquent pas de fuir", étant donné que de nombreux accusés attendent depuis des années d’être jugés.
 
Le Président Ouattara devrait également affirmer clairement que les grâces présidentielles sont exclues pour les auteurs de crimes graves.
 
"Les risques associés à la prestation d’une justice imparfaite sont très réels" prévient encore HRW. 
 
Le procès et la condamnation en mars 2015 de l'ancienne première dame Simone Gbagbo pour crimes contre l'État – et non pour violations des droits humains – commis pendant la crise postélectorale ont été marqués par un certain nombre de préoccupations quant au caractère équitable du procès. 
 
Les lacunes de la procédure ont donné du poids aux efforts déployés par Simone Gbagbo et ses partisans pour dénoncer le verdict de culpabilité et pour remettre en question la légitimité des procédures.
 
Aucun mandat d'arrêt pour le camp Ouattara
 
À ce jour, la CPI n’a émis aucun mandat d’arrêt contre des membres des forces pro-Ouattara, même si la Procureure de la CPI, Fatou Bensouda, a affirmé l’an dernier que les enquêtes de son bureau sur le camp Ouattara se sont intensifiées. La CPI a fait l’objet de critiques pour son approche partiale de la justice dans le pays jusqu’ici.
 
Par ailleurs, en janvier 2016, le procès conjoint de Laurent Gbagbo et de son proche allié, Charles Blé Goudé, pour quatre chefs de crimes contre l'humanité commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011, s’est ouvert devant la Cour pénale internationale (CPI). 
 
« Le travail de la CPI demeure essentiel, pour garantir que les victimes des deux parties au conflit obtiennent justice et pour renforcer la légitimité de la Cour en Côte d’Ivoire », a déclaré Param-Preet Singh selon qui "des procès crédibles tenus dans les tribunaux ivoiriens, parallèlement aux enquêtes de la CPI, démontreraient la volonté du gouvernement de travailler avec ce tribunal afin de mettre un terme à l’impunité."
 
Les partenaires internationaux de la Côte d'Ivoire, notamment la France, les États-Unis, l'Union européenne et les Nations Unies devraient apporter le soutien politique, technique et financier nécessaire au renforcement des efforts du pays visant à mettre effectivement un terme à l’impunité pour les crimes les plus graves, selon Human Rights Watch.
 
« La Côte d’Ivoire pourrait être un modèle s’agissant de juger des crimes internationaux graves dans des procès nationaux a condition que les autorités ivoiriennes rendent une justice qui soit crédible et équitable." a conclu Param-Preet Singh.
 
Ahopol