Des villages kroumen désertés, des populations toujours terrées en brousse par ces temps d’harmattan, la psychose est totale. Les populations, prises entre deux feux, se préparent au pire face au spectre de nouvelles attaques.
Voici le tableau, pour le moins alarmant de l’enfer de la frontière ivoiro-libérienne, dans lequel nous avons fait une incursion du mardi 13 au mercredi 14 janvier 2015. Reportage.
Ce mardi 13 janvier 2015, il est 16h15 mn lorsque nous arrivons à Grabo, ville située à quelques encablures de la frontière ivoiro-libérienne, qui a été l’objet d’une attaque armée, dans la nuit du vendredi 09 au samedi 10 janvier 2015, aux environs de 3h du matin. Notre premier objectif était de nous rendre dans le village de Dahioké situé à une vingtaine de Km de Grabo, précisément dans la sous préfecture d’Olodio, département de Tabou. Après 30 mn de route, nous mettons pieds à terre dans le village.
La vie s’est arrêtée dans cette petite bourgade après le passage d’une vingtaine d’assaillants lourdement armés. Il règne plutôt, un silence de cimetière. Nous avons rencontré malgré tout, un jeune du village, Gnesoa Ludovic, qui a bien voulu s’ouvrir à nous. « Repoussés depuis Grabo, des individus armés s’en sont pris à la position des Frci (Forces républicaines de Côte d'Ivoire) ici à Dahioké où il y a eu des morts. Les échanges de coups de feu étaient très nourris et nous étions obligés de fuir en brousse et dans les villages environnants », s’est-il exprimé, avant d’ajouter : « ces assaillants ont tué deux éléments des Frci dans notre village avant de se fondre dans la forêt située près du fleuve Cavally ».
En parcourant toujours le village, nous tombons sur un homme, la cinquantaine révolue, Kla François. Assis sur la terrasse de son domicile, un verre de vin dans sa main, il nous lance : « J’ai d’abord fui comme tout le monde. Mais je souffre d’un paludisme. C’est pour cela que je suis revenu au village. Comme ça, si je meurs, mes parents pourront au moins retrouver mon corps et m’enterrer. J’ai préféré mourir ici dans mon village que dans la brousse ».
Entre deux gorgées, Kla François ajoute : « Les assaillants, dans leur fuite, sont arrivés dans le village par l’entrée principale qui donne sur le poste des Frci. Ils ont couvert leur fuite par des tirs en l’air, après avoir abattu des militaires, provoquant un sauve-qui peut dans le village ». Kla François ne trouve pas de mots assez durs pour stigmatiser les agissements des assaillants qu’il présente comme des mercenaires libériens qui bénéficient de complicités internes.
« Ce que je sais, c’est que cette zone est aurifère, il y a des clandestins qui sont à la recherche de l’or. Des Libériens, des Ivoiriens et même des militaires s’en donnent à cœur joie et quand ça capote entre eux, ils viennent les attaquer », révèle-t-il. Avant d’ajouter : « En février 2014, il y a eu encore une attaque similaire dans la région de Grabo. Ne cherchez pas ailleurs, c’est à cause de l’or que les libériens attaquent parce que se sentant grugés ».
Fort de cette information et pour avoir le cœur net, nous retournons à Grabo en vue de s’enquérir de l’origine sincère de ces attaques dans cette région frontalière au Libéria.
Une affaire d'or et d'armes
Pour des personnes que nous avons rencontrées à Grabo, la responsabilité de ces attaques n’est pas politique, il faut la rechercher ailleurs. Selon un homme en uniforme, avec qui nous avons échangé le mercredi 14 janvier 2015 dans la ville près du marché, sous le couvert de l’anonymat, « la situation sécuritaire dans la région de Grabo reste très préoccupante avec des mercenaires libériens caractérisés par leur mobilité et armés jusqu’aux dents qui ont attaqué la brigade de gendarmerie et notre base ». Puis de préciser : « L’objectif de ces mercenaires était de s’emparer des armes et les combats qui ont suivi l’attaque de la brigade de gendarmerie ont (...) Lire La suite sur Linfodrome
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