Des mariages éphémères à la pelle

  • Source : lasenegalaise.com


 Autrefois tabou, le divorce semble aujourd’hui se « normaliser ». Effet de mode ou profond changement de mentalité ?

« C’est incroyable ce qui se passe ces derniers temps à Bujumbura : sur 104 mariages enregistrés entre janvier et septembre 2013, nous avons déjà prononcé 13 divorces », raconte la vice-présidente du tribunal de Rohero. Pour elle, il y a autant de raisons que de mariages, mais la pauvreté et la précipitation sont les plus courantes.
Dans la commune de Kinindo, Jean-Bosco Gahinga, le président du tribunal de Rohero, fait le même constat. « C’est une situation de plus en plus fréquente chez les jeunes de Bujumbura, entre 20 et 35 ans. Peut- être que c’est dû à l’occidentalisation. »

Un exemple parmi tant d’autres

Marlène, 25 ans et César, 27 ans, se sont aimés, « un coup de foudre », tient-elle à préciser. Au bout de 6 mois d’un amour indéniable, une grossesse pointe le bout du nez. Voulue ? « Non, accident de parcours », avoue timidement la jeune femme. La famille de la jeune fille exigea alors le mariage. « Vous comprenez, l’honneur de la famille était en jeu ! », explique-t-elle.

Un comité est dépêché, le mariage organisé. Le 20 mars 2012, les jeunes tourtereaux se disent oui… pour toujours. Et des festivités plus que de raison : danseurs, tambourinaires, grands discours, un fabuleux diner avec 400 personnes… En tout 8 million de Fbu ! Trois mois après le mariage, ce qui semblait être une idylle devint vite un enfer. La cause ? « Caractères incompatibles tout simplement », justifie Marlène.

Donner du temps au temps

Pour la vice-présidente du tribunal de Rohero, les jeunes ne prennent plus le temps de se connaître. Pire, il n’y a plus de tolérance entre les époux. « À l’époque, on se mariait pour toujours… Quoi qu’il arrivait dans le couple, on trouvait des compromis, le divorce était impensable car comme on dit, Niko zubakwa (Ainsi va le mariage) … »

Quant à Médiatrice Nibaruta, psychothérapeute, elle considère que « c’est la pression externe qui pousse les gens à choisir telle ou telle autre personne, en fonction de son milieu, son éducation, ses moyens financiers, etc. » Ainsi les mariages de raison ne résistent pas car, selon la psychothérapeute, l’argent ne fait pas le bonheur.

Le divorce, et après ?

« On essaie toujours de réconcilier les époux, mais malheureusement, ils viennent souvent quand il n’y a plus rien à faire… », déplore la vice-présidente. Selon elle, il existe deux sortes de divorces : le divorce par consentement mutuel et le divorce pour causes déterminées. Pour le premier cas, fréquent chez les gens instruits, la solution est trouvée par les futurs ex-époux. « Ils viennent ensemble et s’entendent assez bien pour tout ce qui est partage des biens et garde des enfants » explique-t-elle.

Tandis que pour le second cas, « c’est toujours la partie lésée qui vient demander le divorce et souvent se pose le problème du partage des biens »
La façon dont les Burundais traitent leurs problèmes de couple n’est pas efficace, d’après Médiatrice Nibaruta. « Au lieu de faire des réunions de famille, il faudrait consulter des professionnelles car en psychologie chaque cas est unique », conclut la psychothérapeute.


Par Nadine Sahabo, Iwacu